La mine de Pokrovsk, située dans l’est de l’Ukraine, était jusqu’à récemment un pilier de l’industrie sidérurgique nationale. Son arrêt brutal, annoncé par Metinvest, survient alors que les forces russes se rapprochent de cette ville stratégique, menaçant gravement les infrastructures essentielles de la région.
Depuis le début de son exploitation en 1990, la mine de Pokrovsk a fourni plus de 100 millions de tonnes de coke, un charbon vital pour la production d’acier. Avec une production annuelle stable autour de 5,6 millions de tonnes en 2022 et 2023, malgré la guerre, cette mine représentait un atout majeur pour l’économie ukrainienne. Toutefois, les récents mouvements militaires ont contraint Metinvest à suspendre les opérations, laissant présager des conséquences désastreuses pour l’ensemble de la filière.
Un impact économique colossal
La fermeture de Pokrovsk force l’industrie sidérurgique ukrainienne à se tourner vers des importations coûteuses pour compenser la perte de coke. Selon Oleksandre Kalenkov, président de l’association Ukrmetallurgprom, cette dépendance pourrait réduire la production d’acier nationale à 2,5 millions de tonnes par an, contre 7,5 millions en 2024. Les exportations d’acier, autrefois un levier économique majeur représentant 30 % des exportations totales avant la guerre, risquent de s’effondrer davantage, creusant ainsi un déficit dans les revenus du pays.
Les pertes humaines et sociales sont également significatives. Avant le conflit, la mine employait près de 10 000 personnes, un effectif aujourd’hui réduit à seulement 3 500 travailleurs. Cette érosion de l’emploi illustre les conséquences directes de la guerre sur les populations locales.
Un enjeu stratégique pour la défense
Outre son rôle économique, Pokrovsk joue un rôle crucial dans la stratégie militaire ukrainienne. Située à un carrefour ferroviaire et routier clé, la ville se trouve sur l’axe E50 reliant l’est de l’Ukraine à Dnipro, un centre logistique majeur. Si la ville tombe sous contrôle russe, cette route stratégique pourrait être exploitée pour renforcer les avancées militaires ennemies.
L’acier produit grâce au coke de Pokrovsk est également utilisé pour des fortifications militaires. Sa disparition affaiblit non seulement la capacité industrielle, mais également la défense nationale, dans un contexte où chaque ressource compte pour contenir l’avancée russe.
Un avenir incertain pour la sidérurgie ukrainienne
Les analystes estiment que la perte de la mine de Pokrovsk pourrait modifier durablement le paysage industriel ukrainien. Les entreprises devront repenser leurs stratégies d’approvisionnement, ce qui pourrait affecter leur compétitivité sur le marché international. Volodymyr Landa, analyste au Centre de stratégie économique à Kiev, prévoit une augmentation des coûts de production et une pression accrue sur les marges bénéficiaires des entreprises métallurgiques.
Avec une production d’acier en chute libre et des infrastructures en péril, l’Ukraine fait face à des défis colossaux. L’avenir de Pokrovsk, bien que compromis à court terme, demeure une question centrale pour les décideurs ukrainiens et leurs alliés internationaux.