La Cour des comptes remet en question la structure actuelle de la fiscalité énergétique en France, qu’elle juge peu cohérente avec les ambitions climatiques et énergétiques du pays. Selon le rapport, bien que des mesures comme la « composante carbone » aient été mises en place, la fiscalité énergétique n’est pas conçue comme un levier efficace de la politique énergétique et climatique. Cette observation soulève des interrogations sur l’efficacité des mécanismes fiscaux actuels pour répondre aux enjeux de la transition énergétique.
Les ménages français dépensent en moyenne 3 140 euros par an en énergie, répartis entre les coûts du logement (1 720 euros) et des transports (1 420 euros). Les taxes représentent une part significative de ces dépenses : 43 % du prix hors taxes pour l’énergie domestique et 140 % pour les transports. Cette charge fiscale, selon la Cour, crée une « forte sensibilité politique » autour de toute modification de la fiscalité de l’énergie. Pourtant, malgré l’importance de cette fiscalité, son rôle et son impact sur les objectifs énergétiques et climatiques demeurent flous.
Un Processus Décisionnel Centré sur Bercy
Le rapport met en lumière une gouvernance déséquilibrée de la fiscalité énergétique, largement dominée par le ministère de l’Économie et des Finances. Le ministère chargé de l’Écologie et de l’Énergie, jusqu’à récemment, n’a pas contribué de manière significative à l’élaboration de cette fiscalité. De plus, la récente création du secrétariat général à la planification écologique n’a pas encore permis de renforcer cette gouvernance. Cette concentration des décisions au sein d’un seul ministère limite la capacité de la France à intégrer la fiscalité énergétique dans une stratégie plus large de transition.
En l’absence de coordination efficace, les objectifs climatiques risquent de ne pas être atteints de manière optimale. Cette centralisation remet en question la capacité du cadre fiscal à s’adapter aux évolutions rapides des marchés énergétiques et des politiques européennes, notamment en ce qui concerne la tarification du carbone et la régulation des émissions.
Réformes Européennes et Conséquences pour les Consommateurs
Les évolutions récentes des régulations européennes, en particulier la réforme du marché carbone, posent des défis supplémentaires pour la fiscalité énergétique française. La Cour des comptes prévoit que cette réforme pourrait entraîner une hausse des prix du gaz de 11 à 13 % et du carburant de 10 à 11 % à court terme, soit une augmentation de 300 euros par ménage. Cette perspective met en évidence la nécessité d’une fiscalité mieux adaptée et coordonnée pour protéger les consommateurs tout en atteignant les objectifs de réduction des émissions.
Vers une Révision des Mécanismes Fiscaux
Pour répondre à ces enjeux, la Cour des comptes préconise un « suivi transversal des dispositifs fiscaux liés à l’énergie ». L’objectif est de veiller à ce que la fiscalité soit en cohérence avec les objectifs énergétiques et climatiques, sans que les modifications n’aient un impact disproportionné sur les consommateurs ou sur la compétitivité des entreprises. Une telle approche nécessiterait une meilleure coopération entre les différents ministères et une clarification des rôles, en particulier pour le secrétariat général à la planification écologique.
Cette révision pourrait permettre de repositionner la fiscalité énergétique comme un levier stratégique, en tenant compte des contraintes économiques et des réalités du marché. Une fiscalité repensée devrait à la fois encourager l’efficacité énergétique et limiter les impacts économiques négatifs sur les entreprises et les ménages.