Au Kazakhstan, si la Russie suspendait l’unique voie d’exportation du pétrole, les majors énergétiques occidentales perdraient des milliards de dollars. De fait, la fermeture de l’oléoduc Caspian Pipeline Consortium (CPC) interromprait plus de 1% de l’approvisionnement mondial en pétrole. Une telle situation aggraverait ce qui est déjà la plus grave pénurie d’énergie depuis l’embargo pétrolier des années 1970.
Le Kazakhstan, un pays enclavé
Au Kazakhstan, l’oléoduc CPC, traversant le territoire russe, appartient à un consortium de sociétés occidentales, asiatiques, russes et kazakhes. Ainsi, Chevron, Exxon Mobil, Shell et Eni détiennent des participations dans l’oléoduc et dans les champs pétroliers kazakhs. Une interruption des flux pourrait entraîner une baisse de 50 millions de tonnes de pétrole chaque année.
Le 6 juillet, un tribunal de Novorossiisk ordonnait la suspension des activités de l’oléoduc CPC pendant 30 jours. Toutefois, le 11 juillet, un tribunal russe annule la décision et inflige une amende de 200.000 roubles ($3.300). En outre, la Russie, co-propriétaire de l’oléoduc, déclare que l’ensemble des arrêts résulte de problèmes techniques.
Un marché sous tensions
Les dégâts, engendrés par les tempêtes en mars, interrompaient, déjà, les flux de 1,3 million de barils par jour. Les sanctions occidentales perturbent les exportations russes et augmentent les prix de l’énergie, au plus haut niveau depuis 2008. En réaction, la Russie saisit les projets pétroliers et gaziers Sakhaline 1 et 2, détenus, en partie, par Shell et Exxon.
Au Kazakhstan, la menace de fermeture de l’oléoduc CPC semble être une hypothèse vraisemblable. Ainsi, la perte d’un million de barils par jour accentuerait les tensions sur les prix. Ainsi, le prix du baril pourrait atteindre $190 en raison des sanctions ou de problèmes connexes.
Manque d’alternatives pour le Kazakhstan
Le Kazakhstan produit environ 1,6 million de barils par jour de pétrole et exporte environ 80% de ce volume. Sur le reste, 15% transitent également via la Russie et environ 5% partent vers la Chine et d’autres destinations. Ainsi, les exportations s’effectuent via la mer Caspienne et le réseau ferroviaire.
Le Kazakhstan cherche à diversifier les voies d’exportations du pétrole, mais peu d’itinéraires alternatifs existent. L’oléoduc vers la Chine ne relie pas les grands gisements situés à l’ouest du pays. Enfin, au niveau de la mer Caspienne, les exportateurs font face au manque de pétroliers.
Des intérêts majeurs
Chevron, l’entreprise américaine, semble particulièrement exposée à la fermeture de l’oléoduc en raison de sa participation importante représentant 12% de la production totale. La fermeture à long terme menace le plan de croissance de l’entreprise au Kazakhstan. Chevron prévoyait d’augmenter de 40% la production de Tengiz, le plus grand champ pétrolier du pays.
Le consortium Tengiz, dirigé par Chevron avec Exxon, recherche des options d’exportations dans un contexte géopolitique complexe. Il faut souligner qu’Exxon est le deuxième plus grand producteur étranger au Kazakhstan et représente 213.000 barils par jour. Le consortium (Exxon, Eni, Shell et TotalEnergies) représente un total de 538.000 barils par jour.