Le groupe chinois Jiaze New Energy, via sa filiale Heilongjiang Jiayi Rongyuan Green Chemical, a signé un contrat avec la municipalité de Jixi pour le développement d’un complexe de production de carburants alternatifs à partir de biomasse agricole non alimentaire. Le projet, localisé dans la province du Heilongjiang, repose sur une capacité annoncée de 450 000 tonnes par an de méthanol vert, 150 000 tonnes d’éthanol vert et 100 000 tonnes de carburant d’aviation durable (SAF), soit un total bien supérieur aux 300 000 tonnes évoquées publiquement dans les premières communications.
Chaîne complète de transformation et ambition industrielle
Le schéma technique repose sur la conversion de résidus agricoles — principalement la paille et les rafles de maïs — en alcools verts via gazéification, puis en carburant d’aviation par synthèse ATJ (Alcohol-to-Jet). L’échéancier prévoit un début des travaux de génie civil en mai 2026, pour une mise en service industrielle d’ici fin 2027, selon les documents du projet.
Le contrat d’investissement inclut des engagements concrets de la ville de Jixi, notamment en matière de permis administratifs, d’accès à l’électricité décarbonée, de logistique ferroviaire et de stockage saisonnier de biomasse. La logistique repose sur une desserte dédiée via China Railway Harbin Group, confirmant une stratégie de massification des flux.
Certifications internationales et logiques de marchés
La trajectoire de certification ISCC (International Sustainability and Carbon Certification) est intégrée au contrat, ce qui constitue un signal d’alignement avec les exigences européennes. En parallèle, la Chine poursuit une stratégie de contrôle des exportations de carburants durables par quotas, tout en structurant un marché domestique via des pilotes encadrés.
Jiaze assume que la rentabilité du projet dépendra davantage des incitations publiques, des crédits carbone et des mandats réglementaires que d’un avantage coût direct. Le choix d’un procédé ATJ permet de contourner les limites d’approvisionnement en huiles usagées, ressource stratégique en tension dans toute l’Asie.
Risques d’exécution et variables réglementaires
Le projet présente plusieurs risques liés à la réglementation, à la traçabilité des matières premières et aux standards de certification. Les autorités locales ont prévu un accompagnement sur les permis environnementaux, les évaluations de sûreté et les contraintes de stabilité sociale, mais le processus demeure long en zone chimique.
La certification ISCC implique un suivi strict de la chaîne d’approvisionnement, susceptible de ralentir la montée en cadence industrielle si les exigences de traçabilité ou les audits ne sont pas pleinement satisfaits. Par ailleurs, le risque de divergence de standards internationaux est mentionné dans les documents internes, avec des impacts potentiels sur la commercialisation à l’export.
Dimensions financières et arbitrage géopolitique
Le coût total de la première phase du projet oscille entre CNY35.6bn ($4.95bn) et CNY40bn ($5.56bn), selon les sources, sans que le périmètre associé soit précisément défini. Ce flou sur le CAPEX et l’absence d’accords commerciaux fermes avec des offtakers soulèvent des interrogations parmi les analystes sur la soutenabilité du montage financier.
L’Union européenne impose des quotas croissants d’incorporation de SAF via le programme ReFuelEU, créant une demande réglementaire soutenue. En parallèle, la Chine pilote l’essor de ces filières avec une logique de souveraineté industrielle, en favorisant l’implantation d’acteurs capables de capter des flux d’exportation sous quotas encadrés.