L’Iran continue de consolider sa position sur le marché mondial des produits pétrochimiques, en dépit des sanctions sévères imposées par les États-Unis et l’Europe. Pour l’année fiscale débutant en mars 2024, Téhéran prévoit d’augmenter sa production de pétrochimie à 83 millions de tonnes métriques, contre 75 millions de tonnes l’année précédente. En parallèle, les exportations devraient également croître, passant de 30 à 34 millions de tonnes. Cette stratégie d’expansion s’appuie sur des relations commerciales solides, notamment avec la Russie, qui constitue un débouché majeur pour les produits iraniens.
Sanctions et contournement des obstacles financiers
Les sanctions imposées par les États-Unis en février 2023 visaient à renforcer la pression sur le secteur pétrochimique iranien. Ces mesures ciblent neuf entreprises impliquées dans le commerce des pétrochimiques iraniens avec des acheteurs asiatiques. Malgré ces obstacles, l’Iran continue d’acheminer ses produits vers des marchés diversifiés, incluant l’Afrique, l’Amérique du Sud, l’Asie, et l’Europe de l’Est. Les restrictions, bien que problématiques pour les transferts financiers et les opérations bancaires, n’ont pas stoppé le commerce de l’Iran, selon les déclarations de Morteza Shahmirzaee, vice-ministre du Pétrole chargé de la pétrochimie.
Les échanges avec la Russie ont pris de l’ampleur, notamment en raison de la situation géopolitique complexe de la région. Avec les sanctions européennes contre la Russie et l’Iran, les deux pays trouvent un intérêt commun à développer des voies alternatives pour leurs exportations énergétiques. Ces échanges se renforcent dans un contexte où l’Iran cherche à maintenir sa compétitivité face à d’autres producteurs régionaux, comme l’Arabie Saoudite, dont la capacité de production d’éthylène est plus de deux fois supérieure à celle de l’Iran.
Production et dynamique des prix sur le marché mondial
Sur le marché mondial, les prix de l’éthylène, un des produits clés du secteur pétrochimique, ont connu une hausse au cours de l’année 2024. Le prix de référence a atteint 886,52 dollars par tonne métrique début septembre, son niveau le plus élevé depuis juillet 2022. Cette hausse des prix peut potentiellement soutenir les ambitions d’exportation de l’Iran, d’autant plus que le pays prévoit de produire 7 millions de tonnes d’éthylène pour l’année à venir. D’autres produits comme le méthanol et l’urée, avec des productions prévues respectivement de 10 et 8 millions de tonnes, jouent également un rôle central dans la stratégie de diversification des exportations iraniennes.
Le marché intérieur reste également une priorité pour Téhéran. Environ 13 millions de tonnes de produits pétrochimiques sont destinées à la consommation nationale, notamment sous forme de réformats pour l’amélioration de l’indice d’octane de l’essence et de naphta utilisé dans les unités d’oléfines. Les installations pétrochimiques majeures, telles que celles de Tabriz, Imam Khomeini et Shazand, restent des acteurs clés dans cette dynamique de consommation domestique.
Investissements et perspectives de croissance future
L’Iran ne se contente pas de maintenir sa production actuelle. Entre maintenant et 2029, le pays prévoit d’ajouter 35 millions de tonnes par an de nouvelles capacités dans le secteur pétrochimique. Ces investissements visent à renforcer sa position sur le marché global tout en exploitant de nouvelles opportunités, particulièrement en Asie et en Europe de l’Est. L’Iran cherche ainsi à réduire sa dépendance aux circuits financiers traditionnels en renforçant ses accords bilatéraux et ses coopérations avec des partenaires stratégiques, contournant les difficultés liées aux transactions en dollars et à la gestion des devises étrangères.
Ces projets d’expansion indiquent également une intention de capitaliser sur les futurs mouvements des prix du marché pétrochimique mondial. En misant sur des produits comme l’ammoniac et l’éthylène, l’Iran pourrait non seulement consolider sa part de marché mais aussi attirer de nouveaux clients, notamment dans les pays en développement où la demande de produits pétrochimiques continue de croître.
Défis et stratégies d’adaptation face aux contraintes géopolitiques
L’Iran reste conscient des risques associés à ses ambitions d’expansion. Les sanctions internationales, notamment celles imposées par les États-Unis, demeurent un défi constant. Cependant, l’accent mis sur la diversification des marchés, l’augmentation des capacités de production et l’établissement de nouvelles alliances montrent que l’Iran est prêt à s’adapter et à innover. L’objectif est de minimiser l’impact des restrictions financières tout en optimisant les chaînes logistiques et les routes d’exportation.
En conclusion, le secteur pétrochimique iranien représente un exemple de résilience et de stratégie économique complexe dans un environnement géopolitique instable. Les prochaines années seront déterminantes pour mesurer l’efficacité de ces approches face à des sanctions toujours plus restrictives et à un marché énergétique mondial en évolution.