L’Indonésie pourrait faire face à une pénurie de gaz naturel dès 2033 si de nouveaux gisements ne sont pas développés, selon une étude publiée par le cabinet de conseil énergétique Wood Mackenzie. Premier marché gazier d’Asie du Sud-Est, le pays est confronté à la baisse continue de sa production domestique malgré des objectifs ambitieux fixés pour la fin de la décennie.
Le gouvernement vise une production de 12 milliards de pieds cubes par jour (bcfd) de gaz et 1 million de barils de pétrole par jour d’ici 2030. Toutefois, ces objectifs sont compromis par l’épuisement progressif des champs existants. Wood Mackenzie estime que, bien que la demande totale – y compris les exportations sous contrat – reste stable autour de 6 bcfd jusqu’en 2035, un déficit structurel apparaîtrait dans moins de dix ans sans nouvelles mises en production.
Des investissements urgents pour sécuriser l’approvisionnement
Le pays dispose pourtant de ressources considérables encore inexploitées. Plus de 35 trillions de pieds cubes (tcf) de réserves ont été identifiées dans les gisements Abadi, Geng North, Tangkulo et Layaran. À cela s’ajoutent quelque 30 milliards de barils équivalent pétrole (bnboe) estimés dans les bassins de Sumatra Nord et Sud et de Java Nord-Est, selon le forum Indonesia Exploration.
Pour exploiter ce potentiel, un investissement d’environ $50 milliards sera nécessaire, d’après les estimations du cabinet. “Développer de nouveaux gisements demande du temps et des ressources, surtout lorsqu’ils sont éloignés des infrastructures existantes”, a déclaré Andrew Harwood, Vice President Corporate Research chez Wood Mackenzie. Il rappelle que l’environnement économique et réglementaire joue un rôle décisif pour raccourcir les délais de mise en production.
Maintenir l’attractivité du secteur gazier
Selon Wood Mackenzie, l’Indonésie doit renforcer la sécurité contractuelle, instaurer des mécanismes de tarification du gaz adaptatifs, et accorder davantage de flexibilité aux producteurs. Cela permettrait de sécuriser les engagements d’achat à long terme tout en permettant aux opérateurs de vendre à d’autres clients si nécessaire.
“L’Indonésie a les ressources nécessaires pour répondre à sa demande intérieure, mais elle doit anticiper”, a affirmé Joshua Ngu, Vice Chairman pour l’Asie-Pacifique chez Wood Mackenzie. Il ajoute que des politiques stables et attractives sont indispensables pour maintenir la compétitivité du pays sur la scène internationale.
Entre arbitrage énergétique et pression économique
En l’absence de nouveaux projets, l’Indonésie devra intensifier ses importations de gaz naturel liquéfié (GNL), généralement plus coûteuses. Le pays pourrait aussi être tenté de soutenir davantage la filière charbon, moins onéreuse mais plus émettrice, dans le secteur électrique. Or, le gaz demeure un intrant clé pour l’industrie nationale.
“Les bonnes incitations permettront à l’Indonésie de préserver sa position de fournisseur gazier tout en évitant une crise énergétique intérieure”, conclut Aruna Mannie, Directrice Consulting chez Wood Mackenzie.