Le Haut Conseil pour le Climat (HCC) vient de rendre son rapport 2021. Ce dernier tire la sonnette d’alarme : les efforts climatiques de la France sont insuffisants. À ce rythme, l’organisme estime que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2030 ne seront pas atteints.
Le Haut Conseil pour le Climat publie son rapport 2021
Le Haut Conseil pour le climat (HCC) publie son rapport annuel, qui rend compte de la situation climatique actuelle. Il évalue notamment l’efficacité des politiques publiques mises en place pour lutter contre le réchauffement climatique. Et pour la première fois, le rapport Renforcer l’atténuation, engager l’adaptation, s’intéresse aux impacts du réchauffement climatique et aux politiques d’adaptation.
« Les efforts actuels sont insuffisants »
La France objective de réduire ses émissions de CO2 de 50% d’ici à 2030 par rapport à celle de 1990. Pour ce faire, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), feuille de route du gouvernement, en fixe les plafonds. Mais le HCC prévient :
« Les efforts actuels sont insuffisants pour garantir l’atteinte des objectifs de 2030. D’autant plus dans le contexte de la nouvelle loi européenne sur le climat »
Cette loi européenne sur le climat adoptée le 28 juin 2021 par les États membres de l’Union Européenne rend les objectifs climatiques juridiquement contraignants.
Concernant les objectifs français. Déjà, la France a dépassé les plafonds définis entre 2015 et 2018, obligeant un réajustement et valant une condamnation de l’État.
Ainsi, pour la période 2019-2023, la SNBC a revu à la baisse les objectifs d’émissions de carbone. Une solution temporaire puisque la France devra, dans tous les cas, atteindre les objectifs européens contraignants fixés pour 2030.

2019-2023 : des émissions en baisse grâce au Covid-19
Par ailleurs, le HCC observe une baisse des émissions de CO2 en 2019 de 1,9% par rapport à 2018, poursuivie en 2020 d’une chute de 9%. Mais l’organisme explique que cet affaiblissement des émissions, plus rapide qu’espéré, est lié, d’une part, à la hausse des plafonds. D’autre part, la pandémie de Covid-19, entraînant confinements et ralentissement, voire arrêt des activités, en est le principal facteur.
De fait, la France a atteint ces niveaux grâce à la pandémie et une réduction des objectifs pour la période. Mais non grâce à un réel changement structurel durable. À contrario, le HCC insiste alors sur le caractère nécessaire d’accélérer le rythme.
Le Haut Conseil pour le Climat relève donc l’hypocrisie de l’État français, pionnier des prises de décisions climatiques à l’échelle européenne. Mais qui pourtant « peine à atteindre ses propres objectifs nationaux ».
Ainsi, la France devra prendre de nouvelles mesures pour respecter ses ambitions nationales et européennes. À la lumière notamment du rehaussement des objectifs de l’Union Européenne qui seront présentés le 14 juillet 2021. Les baisses d’émissions de carbone passeront de 40 à 55% en 2030 par rapport à 1990.
2 Français sur 3 déjà exposés aux risques climatiques
Parallèlement, la Présidente du HCC, Corinne Le Quéré, énonce que « Les deux-tiers de la population française sont déjà fortement ou très fortement exposés aux risques climatiques ». En cause, une hausse de 1,7°C depuis l’ère pré-industrielle, soit 0,6°C de plus que la moyenne mondiale.
En ce sens, l’organisme souligne dans son rapport l’insuffisance de la prise en compte de l’impact environnemental dans les propositions de loi françaises. Entre octobre 2019 et mars 2021, 4% des articles de loi seulement, auraient fait l’objet d’une étude d’impact environnemental.
De plus, les mécanismes d’évaluation du Parlement seraient davantage portés sur les piliers socio-économiques qu’environnementaux. Le HCC déplore également le manque de détails sur l’impact climatique – quantitatif / qualitatif – du projet de loi « Climat et résilience ».

Plusieurs secteurs lacunaires dans le pays
De plus, peu de politiques publiques sont réellement alignées sur l’orientation SNBC. La plupart le sont partiellement, voire éloignées ou impossible à juger. Beaucoup d’indicateurs sont au rouge, notamment dans le secteur des transports, pourtant le plus important émetteur de gaz à effet de serre en France avec 31% des émissions totales.
Le HCC estime l’action publique « insuffisante » concernant les transports. Mais le mot revient dans le secteur industriel, dont les enjeux de transition bas-carbone sont en partie intégrés, mais « insuffisamment ». Même refrain pour l’agriculture, qui « réduit lentement ses émissions de GES » et doit produire « des efforts significatifs ».
Quid du secteur énergétique
La France obtient un meilleur score que ses voisins européens concernant les émissions du secteur énergétiques. Cependant, pour le HCC, les orientations stratégiques ne permettent pas, à ce jour, de garantir l’atteinte des objectifs climatiques. Ce, en raison d’un déploiement des énergies renouvelables lacunaire.
Par ailleurs, le recours massif à l’énergie nucléaire (deux tiers de la consommation électrique) permet à la France de produire une électricité bas-carbone.
Quelques recommandations du HCC
Pour pallier retard pris par l’État français, le HCC conseille de doubler le rythme actuel de réduction d’émissions. En 2021, les émissions doivent réduire de 3%, et une moyenne de -3,3% est attendue sur la période 2024-2028.
Le HCC préconise également de revoir les objectifs à la hausse et d’avancer la date d’arrêt des véhicules thermiques à 2030. De même, cette date devrait signifier la sortie des énergies fossiles pour le chauffage des bâtiments. Ainsi que la fin des exemptions de taxes sur le fioul à usage agricole.
Matignon se veut rassurant
Le gouvernement français ne partage pas les inquiétudes du Haut Conseil pour le climat. Il estime « toujours que nous sommes capables d’atteindre notre objectif de 2030 ». Néanmoins, l’État assure travailler à renforcer les objectifs français et prendre, dès la fin de l’été, de nouvelles mesures.
Le HCC a tout de même jugé le plan de relance post-Covid-19 encourageant. Ce dernier consacrant pas moins de 28 milliards d’euros à la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, il indique que le gouvernement devra poursuivre ces financements pour opérer de réels changements structurels. L’État français assure avoir les moyens de ses ambitions.