Des entreprises prestataires chargées de la remise en état de réacteurs d’EDF à l’arrêt pour des problèmes de corrosion envisagent de relever les seuils d’exposition à la radioactivité auxquels sont soumis certains salariés, a-t-on appris auprès du groupe EDF, sous pression de l’exécutif pour augmenter rapidement sa production électrique en vue de l’hiver.
Cette mesure accompagnée du recours à une main-d’œuvre américaine de soudeurs spécialisés, envisagé par EDF, illustre le marathon en cours pour faire repartir un maximum de réacteurs avant fin février dans un contexte de crise énergétique européenne, qui fait redouter des pénuries d’énergie hivernales.
Le groupe EDF est privé de près de la moitié de son parc nucléaire, ce qui fragilise la production électrique française. Vendredi, 29 de ses 56 réacteurs étaient à l’arrêt, notamment pour des problèmes de corrosion apparus l’hiver dernier dans ses centrales les plus récentes.
Dans ce contexte, EDF a été informé “par certains” de ses partenaires Sous-traitants “que ceux-ci envisagent de relever, pour quelques-uns de leurs salariés”, leurs limites de doses radioactives (contraintes de dose, ndlr), a expliqué le groupe dans une déclaration écrite transmise à l’AFP, confirmant des informations de Reuters.
Le relèvement de cette “contrainte de dose” concerne plusieurs entreprises – dont les noms n’ont pas été communiqués par EDF -, qui interviennent sur les chantiers pour régler ces problèmes de corrosion.
“Nous avons ainsi connaissance d’une situation où elle pourrait être relevée de 12 à 14 millisieverts (mSv)” par an, a précisé le groupe.
Ce seuil reste “bien en deçà du seuil règlementaire fixé pour tous les travailleurs exposés aux rayonnements ionisants, qui est de 20 mSv par an en France, contre 50 mSv aux Etats-Unis”, a indiqué à l’AFP Klervi Leuraud, experte en rayonnements ionisants à l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), contactée par l’AFP
“On est donc tout à fait dans la zone acceptable et réglementaire”, a souligné l’experte.
“Chaque employeur, dont les salariés sont soumis aux effets des rayonnements ionisants, se doit, au titre du code du travail, de fixer une +contrainte de dose+ à ne pas dépasser pour ses salariés”, et qui soit “en dessous du seuil de 20 mSv par an fixé par la réglementation”, a détaillé EDF.
Selon le groupe, certains de ses sous-traitants avaient adopté jusqu’ici des doses d’expositions limites plus protectrices que celles en vigueur chez EDF avant de revenir finalement sur ce choix.
“Pour les salariés EDF, cette contrainte de dose est de 14 mSv par an”, une valeur également “adoptée” par ses sous-traitants, sauf “certains d’entre eux qui avaient opté pour “des valeurs plus basses”, 12 mSv/ an, donc.
EDF a régulièrement mis en avant la pénurie d’ouvriers qualifiés formés pour réparer rapidement les corrosions découvertes l’hiver dernier dans ses centrales les plus récentes.
Une situation qui contraint aujourd’hui EDF à envisager le recours “à des équipes expérimentées nord-américaines” de soudeurs, même si elle n’est pas jugée “exceptionnelle” pour EDF.
“Certains salariés français de nos partenaires industriels sont eux-mêmes amenés à intervenir sur des centrales étrangères”, a précisé le groupe.
En raison de l’indisponibilité exceptionnelle du parc nucléaire français, le groupe EDF a dû revoir à la baisse sa production nucléaire estimée pour 2022, qui se situe désormais “dans le bas de la fourchette 280-300 TWh” contre 295-315 TWh dans sa précédente prévision.