Le groupe public doté du monopole de la fourniture d’électricité au Sri Lanka, lourdement déficitaire, veut augmenter de plus de 800% ses tarifs, au détriment des plus démunis.
Le pays, miné par la pire crise économique depuis son indépendance en 1948, est à court de dollars pour importer les carburants nécessaires à la production d’électricité. Dans ce contexte de crise, le CEB (Ceylon Electricity Board), seul fournisseur d’électricité au Sri Lanka, contrôlé par l’Etat, qui accusait une perte de 65 milliards de roupies (185 millions de dollars) au premier trimestre, a réclamé une hausse de 835% des tarifs subventionnés pour les foyers les plus démunis, a expliqué lundi la Commission des services publics du Sri Lanka (PUCSL).
Le système de tarification en vigueur jusqu’à présent permet à un foyer consommant moins de 30 kilowatts par mois de bénéficier d’un tarif forfaitaire de 54,27 roupies (0,15 dollar), que le CEB veut désormais porter à 507,65 roupies (1,44 dollar).
Pour le président de la PUCSL, Janaka Ratnayake, “la majorité des consommateurs ne pourra pas faire face à une telle augmentation”. “C’est pourquoi nous proposons une subvention directe du Trésor pour réduire de plus de moitié l’augmentation réclamée” par le CEB, a-t-il expliqué devant la presse à Colombo.
Le gouvernement n’a pas encore tranché sur les tarifs appliqués aux particuliers mais ceux pour le commerce et l’industrie augmenteront de 43 à 61%, a-t-il précisé. Le CEB pourra aussi s’appuyer sur la contribution des utilisateurs détenteurs de dollars, tels que les entreprises exportatrices, afin de financer l’importation de pétrole et de pièces détachées.
Moscou et Doha
Depuis le début de l’année, les prix du diesel ont plus que quadruplé et ceux de l’essence plus que doublés au Sri Lanka, où ces deux carburants font défaut. Le ministre de l’Energie, Kanchana Wijesekera, a dit ne pas pouvoir donner un calendrier des prochaines livraisons dans un pays entièrement dépendant de l’étranger pour son approvisionnement en pétrole.
Le ministre, après avoir présenté ses excuses aux automobilistes dimanche, a annoncé que deux de ses collègues étaient en route pour Moscou afin de négocier des baisses de tarifs des carburants. M. Wijesekera s’est lui-même rendu au Qatar pour négocier également une baisse des tarifs des hydrocarbures fournis au Sri Lanka.
Lundi, le gouvernement s’est vu contraint d’annoncer la suspension de toute vente de carburants pour deux semaines, à compter de minuit dans la nuit de lundi à mardi, excepté dans les secteurs essentiels comme la santé. Une décision qui vise à “préserver les petites réserves de carburants qu’il nous reste”, a expliqué le porte-parole du gouvernement Bandula Gunawardana, en s’excusant une nouvelle fois auprès des consommateurs.
Incapable de rembourser les quelque 51 milliards de dollars qu’il doit au titre de sa dette extérieure, le Sri Lanka a invoqué le défaut de paiement en avril pour entamer des négociations avec le Fonds monétaire international (FMI).
Une délégation du Trésor américain et du département d’Etat est arrivée dans le pays pour “explorer les moyens les plus efficaces pour que les États-Unis aident les Srilankais dans le besoin”, a expliqué l’ambassade américaine à Colombo.
Les Nations unies avaient prévenu le 10 juin que la crise économique sans précédent que traverse le Sri Lanka pourrait se transformer en une grave crise humanitaire, des millions de personnes ayant déjà besoin d’aide.