Gazprom a annoncé la signature d’un mémorandum juridiquement contraignant avec China National Petroleum Corporation (CNPC) pour le projet de gazoduc Force de Sibérie 2. Le document a été signé dans le cadre de la visite du président russe Vladimir Poutine à Pékin, marquant une étape majeure dans un dossier en discussion depuis plusieurs années. Le gazoduc, long de plusieurs milliers de kilomètres, permettrait d’acheminer jusqu’à 50 milliards de mètres cubes de gaz par an vers la Chine à travers la Mongolie.
Un projet stratégique pour Moscou
Le président du conseil d’administration de Gazprom, Alexeï Miller, a déclaré que ce projet soutient les objectifs à long terme de la Russie en matière de redéploiement énergétique. Ce gazoduc viendrait renforcer l’axe énergétique entre Moscou et Pékin, alors que la Russie continue de réorienter ses exportations vers l’Asie à la suite des sanctions occidentales. La perte du marché européen, consécutive aux restrictions imposées après le déclenchement du conflit en Ukraine, a intensifié les efforts russes pour diversifier ses débouchés.
La Russie fournit déjà du gaz à la Chine via le gazoduc Force de Sibérie 1, opérationnel depuis 2019. Celui-ci permet le transit de volumes significatifs depuis les champs gaziers de Sibérie orientale. Le projet Force de Sibérie 2, quant à lui, viserait à exploiter les gisements de l’ouest sibérien, historiquement orientés vers l’Europe, afin de les rediriger vers le marché chinois.
Hausse des volumes et approbation mongole
En parallèle à la signature du mémorandum, Gazprom et CNPC ont convenu d’augmenter les volumes livrés via le gazoduc Force de Sibérie 1, qui passeront de 38 à 44 milliards de mètres cubes par an. Selon Alexeï Miller, Force de Sibérie 2 constitue à ce jour « le projet le plus capitalistique de l’industrie gazière mondiale ». Le gazoduc traversera le territoire mongol via le couloir dit Soyouz Vostok, dont l’étude de faisabilité a été finalisée en janvier 2022. L’autorité nationale d’expertise de Mongolie a validé le projet en mars 2025.
Le tracé proposé reliera les champs gaziers de Sibérie occidentale à la région autonome ouïghoure du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine. Le gouvernement mongol s’est déjà positionné comme acteur facilitateur du transit, renforçant l’intérêt régional autour de ce corridor énergétique.
Un repositionnement géopolitique sans rupture totale
Selon Mark Episkopos, chercheur Eurasie au Quincy Institute for Responsible Statecraft, ce projet marque « une volonté claire de réorienter les exportations énergétiques russes vers l’est ». Il estime néanmoins que cette stratégie n’exclut pas la possibilité d’un futur réengagement avec l’Europe. « Maintenir une relation énergétique avec l’Europe reste dans l’intérêt économique de long terme de Moscou, dans une logique de portefeuille diversifié », a-t-il précisé, ajoutant que toute reprise dépendrait d’un règlement diplomatique du conflit en Ukraine.
Vingt-deux accords de coopération ont été signés au total entre les délégations russe et chinoise lors de la visite de Vladimir Poutine, renforçant l’encrage énergétique du partenariat bilatéral. Aucun calendrier précis ni enveloppe financière définitive n’a encore été communiqué pour Force de Sibérie 2.