En Ile-de-France, la géothermie profonde s’impose progressivement comme une solution énergétique majeure, en particulier dans les zones à forte densité urbaine. Depuis les premières installations des années 1980, elle constitue une alternative crédible aux sources traditionnelles de chauffage, comme le gaz naturel ou le fioul, encore largement utilisés dans les réseaux de chaleur. Le principe est simple : exploiter la chaleur des nappes aquifères profondes, situées à environ 1 500 mètres sous terre, pour alimenter des infrastructures publiques et privées en chaleur.
Dans la région, ce procédé permet de chauffer plusieurs milliers de logements et bâtiments publics grâce à un doublet géothermique, un système comprenant deux puits, l’un pour extraire l’eau chaude et l’autre pour la réinjecter après utilisation. Ces installations, tout en étant fiables sur le plan technique, ont l’avantage de ne pas être soumises aux fluctuations des marchés internationaux de l’énergie, contrairement aux combustibles fossiles.
Stabilisation des coûts et indépendance énergétique
L’un des principaux avantages de la géothermie en Ile-de-France est la stabilité des coûts qu’elle offre. Alors que les prix du gaz et du pétrole ont connu des hausses imprévisibles ces dernières années, notamment en raison des tensions géopolitiques comme la guerre en Ukraine en 2022, les projets géothermiques permettent de maintenir un prix de l’énergie stable sur plusieurs décennies. Cela représente un atout majeur pour les collectivités locales et les grands ensembles de logements, qui cherchent à sécuriser leurs dépenses énergétiques sur le long terme.
Les réseaux de chaleur géothermiques, en assurant une fourniture constante et prévisible, répondent ainsi à une problématique cruciale : comment protéger les consommateurs des variations de prix des énergies fossiles tout en s’engageant dans une démarche de décarbonation. L’exemple du projet de Chesnay-Roquencourt, lancé en 2022, illustre cette démarche. Il permettra de chauffer près de 9 000 équivalents-logements à partir de 2026 avec une réduction estimée de 18 500 tonnes équivalent CO2 par an. Cette réduction, bien qu’importante, est avant tout une solution pragmatique pour les collectivités qui veulent limiter les impacts financiers liés à l’énergie.
Performance énergétique et rentabilité
La géothermie en Ile-de-France présente également des performances énergétiques particulièrement élevées. Selon le Syndicat des Énergies Renouvelables (SER), pour chaque kilowattheure (kWh) d’électricité consommé par le système géothermique, jusqu’à 20 kWh d’énergie thermique peuvent être produits. Ce rendement, bien supérieur à celui des chaudières traditionnelles, en fait une solution non seulement plus économique à long terme, mais aussi moins vulnérable aux hausses des prix de l’électricité.
La faible emprise foncière nécessaire à la mise en place de puits géothermiques en milieu urbain renforce également l’intérêt de cette technologie. Les forages, bien que profonds, nécessitent peu d’espace en surface, ce qui permet une intégration aisée dans des zones densément peuplées, sans perturber l’environnement urbain ni les activités locales. Cet aspect est crucial dans une région comme l’Ile-de-France, où la pression immobilière est forte et les besoins en chaleur élevés.
Une solution éprouvée et adaptable
La géothermie n’est pas une technologie nouvelle dans le bassin parisien. Depuis les premiers forages dans les années 1980, elle s’est imposée comme une source d’énergie renouvelable fiable pour les réseaux de chaleur. En 2022, ce sont plus de 55 installations géothermiques profondes qui produisent environ 1 700 GWh par an, soit l’équivalent de la consommation énergétique de 200 000 logements. Ce potentiel, largement sous-exploité jusqu’à présent, pourrait jouer un rôle encore plus important dans les années à venir.
Le soutien d’organismes publics, comme l’Agence de la transition écologique (Ademe), a permis de dynamiser le secteur en facilitant les investissements dans ces infrastructures. Les collectivités locales, ainsi que les syndicats de copropriétaires, comme celui de Parly 2 pour le projet de Chesnay-Roquencourt, y voient une solution pérenne pour maîtriser leurs coûts énergétiques, tout en contribuant aux objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Perspectives de développement en France
À l’échelle nationale, la géothermie pourrait jouer un rôle de plus en plus important dans la stratégie énergétique de la France. Avec des projets comme celui du Chesnay-Roquencourt, le pays dispose d’un savoir-faire technique et d’un potentiel géologique à exploiter davantage. En Ile-de-France, des initiatives similaires devraient voir le jour dans les prochaines années, notamment pour répondre à la demande croissante en énergie des nouvelles constructions et pour pallier la dépendance aux énergies fossiles. Le développement de nouveaux forages et l’extension des réseaux de chaleur permettront de renforcer l’indépendance énergétique des villes et de stabiliser durablement les coûts pour les consommateurs.