Le réacteur EPR de Flamanville, le premier de ce type construit en France depuis 20 ans, vient de terminer le chargement de son combustible, marquant ainsi une étape cruciale dans sa mise en service. C’est également une avancé dans le secteur du nucléaire français. D’une capacité de 1.600 mégawatts (MW), ce réacteur sera le plus puissant du pays et pourra alimenter près de trois millions de ménages. Douze ans après la date initialement prévue, l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) a donné son feu vert, permettant de franchir cette étape tant attendue. Les équipes d’EDF ont exprimé leur fierté et leur émotion lors de cet événement, soulignant les défis surmontés tout au long de ce chantier complexe.
Un chargement de combustible millimétré
Le chargement du combustible a nécessité une préparation minutieuse. Pendant une semaine, une trentaine d’opérateurs ont travaillé 24h/24 pour insérer environ 60.000 crayons, de fins tubes contenant des pastilles d’uranium, dans la cuve du réacteur. Cette opération, réalisée sous une épaisseur de 20 mètres d’eau pour protéger des effets de la radioactivité, a été un succès, permettant de fermer la cuve et de commencer la montée en pression et en température de la chaudière. Le directeur de l’exploitation de Flamanville 3, Grégory Heinfling, a décrit ce moment comme un mélange d’émotion et de concentration, nécessaire pour assurer la sécurité et le bon déroulement des opérations.
« Il y en a qui ont versé une petite larme », d’autres « ont sauté de joie », on s’est même « un peu embrassés. »
Perspectives et objectifs
La mise en service complète du réacteur est prévue pour la fin de l’année, après une série d’essais et d’autorisations. La première réaction de fission nucléaire, ou « divergence », est attendue pour fin juin. Ensuite, EDF atteindra progressivement différents paliers de puissance, avec le « couplage » au réseau électrique prévu pour l’été. La turbine Arabelle 1000, la plus puissante au monde, entrera alors en action pour produire de l’électricité. Un avis final sera requis pour atteindre les 100% de puissance, ce qui est prévu pour fin 2024. Pour les étapes futures, le réacteur devra franchir plusieurs paliers avant d’atteindre sa pleine capacité. Notamment, la montée en pression et en température de la chaudière est une phase critique qui nécessitera une surveillance étroite et des tests rigoureux. Le moment tant attendu de la « divergence » marquera le début de la fission nucléaire, un jalon clé pour le projet. Une fois ce stade atteint, le réacteur pourra être progressivement couplé au réseau électrique, délivrant ses premiers électrons et contribuant à la fourniture d’électricité en France.
Défis et controverses
Le chantier de Flamanville a été marqué par de nombreux défis, avec une facture quadruplée à 13,2 milliards d’euros selon EDF. Les associations écologistes, comme Sortir du Nucléaire, continuent de s’interroger sur la fiabilité de l’EPR, critiquant une mise en service qu’elles jugent hâtive. En raison des multiples retards et des dépassements de coûts, des questions persistent quant à la viabilité et la sécurité de ce type de réacteur. Toutefois, Alain Morvan, directeur du projet, assure que l’installation est de haute qualité et promet une exploitation sûre. Il reconnaît les « moments douloureux » mais souligne la résilience des équipes d’EDF, qui ont toujours su rebondir face aux difficultés. La prochaine étape majeure sera la montée en puissance du réacteur, avec une première phase de production à 25% de sa capacité totale. À ce stade, le réacteur sera connecté au réseau électrique, et la turbine Arabelle 1000 commencera à tourner à pleine vitesse, produisant de l’électricité. Le succès de cette phase dépendra d’une série de tests rigoureux et de l’approbation continue de l’ASN. La production à pleine capacité est attendue pour fin 2024, avec une première visite de maintenance prévue pour fin 2025.
Implications pour l’avenir du nucléaire en France
Le lancement de l’EPR de Flamanville symbolise un tournant crucial pour le secteur nucléaire en France. Alors que le pays cherche à diversifier ses sources d’énergie et à réduire ses émissions de carbone, les réacteurs nucléaires de nouvelle génération jouent un rôle clé dans cette transition. Le succès de Flamanville pourrait influencer la décision de construire d’autres réacteurs EPR en France et ailleurs. L’expérience acquise et les leçons tirées de ce projet seront essentielles pour améliorer la conception, la construction et l’exploitation future de réacteurs nucléaires.
Le lancement du réacteur EPR de Flamanville marque une étape majeure pour le nucléaire français. Malgré les nombreux obstacles, l’achèvement du chargement du combustible et les étapes à venir illustrent la détermination d’EDF à mener ce projet à bien, tout en promettant des normes de sécurité élevées et une production d’énergie stable et fiable. Alors que le monde se dirige vers des sources d’énergie plus durables, le succès du réacteur EPR pourrait offrir une feuille de route pour l’avenir du nucléaire.