La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a décidé de reporter l’application de la hausse du « tarif réseau » (TURPE) au 1er février 2025. Cette décision intervient après une série d’ajustements tarifaires liés aux fluctuations du marché de l’électricité, créant un effet « yo-yo » incompréhensible pour les consommateurs. En décalant cette augmentation de 4,8 %, qui aurait normalement pris effet le 1er août 2024, la CRE cherche à offrir une plus grande lisibilité et prévisibilité des coûts énergétiques pour les ménages et petites entreprises en France.
Le TURPE représente une part importante de la facture d’électricité, couvrant les coûts d’acheminement de l’électricité par les gestionnaires de réseau comme Enedis. Cette hausse retardée aurait dû entraîner une augmentation de près de 1 % sur les factures des abonnés au tarif bleu d’EDF. Cependant, en repoussant la hausse au 1er février, date habituelle de révision des TRVE (tarifs réglementés de vente de l’électricité), la CRE espère qu’elle sera compensée par une baisse anticipée des prix de l’électricité sur le marché de gros.
Anticipations des prix de l’électricité pour début 2025
Les prix de l’électricité sur les marchés européens ont montré des signes de stabilisation autour de 60 à 70 euros par mégawattheure (MWh) ces derniers mois. Cela représente une nette amélioration par rapport aux sommets de 2022, causés par la crise en Ukraine et les perturbations post-Covid. Dans ce contexte, la CRE prévoit une baisse d’au moins 10 % des TRVE en février 2025, une première depuis le début de la crise énergétique.
Cette baisse estimée intègre la hausse retardée du TURPE ainsi que le relèvement prévu de l’accise sur l’électricité, qui est en cours de rétablissement après avoir été temporairement ajustée en réponse à la crise énergétique. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, avait déclaré en juin que la facture d’électricité des ménages français pourrait diminuer de 10 à 15 % dès février 2025, offrant ainsi une bouffée d’oxygène attendue pour les consommateurs.
Conséquences pour les ménages et les offres de marché
Pour les ménages sous tarifs réglementés, une baisse de 10 % pourrait signifier une économie de l’ordre de 200 euros par an, sur la base d’une facture annuelle moyenne de 2 000 euros. Cette réduction intervient dans un contexte de tension sur les coûts de l’énergie, où les prix ont augmenté de plus de 43 % en deux ans malgré les mesures de soutien du gouvernement. Il est important de noter que la hausse du TURPE s’appliquera dès le 1er novembre 2024 pour les 17,5 millions de ménages et entreprises qui ont souscrit à des offres de marché indexées sur les prix de gros.
Les fournisseurs d’électricité ont toutefois la possibilité de choisir s’ils répercutent ou non cette augmentation sur leurs clients. Selon la CRE, il est probable que peu d’entre eux le fassent, car leurs offres de marché sont actuellement environ 20 % inférieures aux TRVE. Cela pourrait créer une dynamique concurrentielle où les offres de marché deviennent plus attractives pour certains segments de clients.
La régulation comme levier de stabilité
La régulation des tarifs par la CRE vise à atténuer les impacts des fluctuations volatiles du marché de l’électricité sur les consommateurs finaux. Le report de la hausse du TURPE à février 2025 s’inscrit dans cette logique de gestion de la volatilité tarifaire. Cela est crucial à un moment où l’électricité devient une source d’énergie de plus en plus prédominante, notamment pour accompagner la décarbonation progressive du mix énergétique en France.
L’infrastructure électrique nécessite des investissements continus pour assurer la sécurité et la qualité d’approvisionnement, et ces coûts sont en partie couverts par le TURPE. La décision de la CRE de maintenir cette augmentation tout en la décalant reflète un équilibre entre la nécessité de financer le réseau et la volonté de protéger les consommateurs des augmentations soudaines de prix.
Enjeux futurs pour le secteur électrique français
À l’avenir, la gestion des coûts de l’énergie et des infrastructures associées restera un défi clé pour les régulateurs et les acteurs du marché. Le mécanisme d’ajustement tarifaire annuel du TURPE devra être soigneusement calibré pour éviter de peser sur la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages tout en garantissant un financement adéquat pour l’infrastructure électrique.
La transition vers une plus grande utilisation de l’électricité comme source d’énergie de substitution nécessitera également une adaptation continue des politiques tarifaires et de régulation. Les récentes décisions de la CRE illustrent cette complexité et la nécessité de maintenir un dialogue constant entre les acteurs de la chaîne de valeur énergétique en France.