Les experts prévoient que jusqu’à 1,5 million de barils par jour pourraient être supprimés en Europe d’ici 2030, transformant radicalement le secteur du raffinage.
Transition Énergétique et Réduction de la Capacité
L’ère dorée du raffinage européen touche à sa fin alors que les entreprises doivent faire face à une transformation majeure en raison de la transition énergétique. La demande de carburants fossiles diminue progressivement, entraînée par l’essor des véhicules électriques et les politiques de réduction des émissions de CO2. L’International Energy Agency (IEA) prévoit que 1 à 1,5 million de barils par jour (b/j) de capacité de raffinage en Europe pourraient être fermés d’ici 2030, soit une réduction bien supérieure aux fermetures moyennes annuelles de 220 000 b/j observées jusqu’à présent.
Fermetures et Conversions en Cours
Des annonces récentes de fermetures de raffineries en Allemagne, en Italie et au Royaume-Uni montrent la tendance. Shell prévoit de cesser le traitement du brut sur son site de Wesseling d’ici 2025, tandis que BP réduit d’un tiers sa capacité à Gelsenkirchen. En Italie, la raffinerie de Livourne a suspendu ses activités, et la raffinerie de Grangemouth au Royaume-Uni pourrait également fermer. Ces premières annonces marquent le début d’une transformation plus large, alors que les raffineurs doivent adapter leur modèle économique face aux nouvelles réalités du marché.
Déclin des Marges et Nouveaux Défis
La guerre en Ukraine a temporairement retardé les fermetures de raffineries en augmentant les marges. Cependant, les marges sont revenues à des niveaux plus normaux. Selon S&P Global Commodity Insights, les marges de l’ultra-low sulfur diesel (ULSD) en Europe du Nord-Ouest, qui ont culminé à 42 $/b en 2022, ont chuté à 29,71 $/b en 2023. À long terme, les marges devraient continuer à diminuer, avec une demande de gasoil et d’essence en baisse dès 2025.
Stratégies d’Ajustement et Perspectives Futures
Face à cette baisse des marges, de nombreux raffineurs choisissent de fermer leurs sites en Europe et de se concentrer sur d’autres régions. ExxonMobil a réduit d’un tiers sa capacité en Europe de l’Ouest depuis 2000, tandis que Shell vise à n’avoir plus que deux raffineries en Europe, se focalisant sur l’Amérique du Nord et la Chine. Selon les prévisions, les taux d’utilisation des raffineries en Europe du Nord-Ouest pourraient passer de 84 % en 2024 à 81 % en 2027, entraînant des fermetures accélérées entre 2029 et 2030.
Conversions Vers les Biocarburants
Certains raffineurs voient une opportunité à long terme dans la conversion de leurs installations en sites de production de biocarburants ou en intégration avec des installations pétrochimiques. La raffinerie de Livourne en Italie et celles de La Mède et Grandpuits en France sont des exemples de cette tendance. Cependant, la rentabilité de ces projets reste incertaine, dépendant fortement des politiques gouvernementales pour stimuler la demande et l’investissement dans ce secteur naissant.
L’industrie européenne du raffinage se dirige vers une transformation profonde, dictée par les pressions de la transition énergétique et la concurrence mondiale. Les fermetures et conversions de raffineries marquent un tournant historique, nécessitant une adaptation stratégique pour survivre et prospérer dans un avenir où les énergies propres domineront.