La Russie a déclaré qu’elle mettrait au point d’ici jeudi les modalités pratiques permettant aux entreprises étrangères de payer son gaz en roubles. Cette mesure augmente la probabilité de perturbations de l’approvisionnement de l’Europe en gaz russe.
Des mesures russes radicales
Afin de répondre aux sanctions occidentales, la Russie a pris un certain nombre de mesures. Le rouble a en effet atteint son niveau le plus bas historiquement. Les autorités russes cherchent donc à réévaluer la valeur de leur monnaie.
Les pays occidentaux devront régler en rouble
L’ordre a été donné la semaine dernière par le président Vladimir Poutine de faire payer le gaz russe en rouble aux pays « inamicaux ». Cette décision historique doit permettre au rouble de regagner une partie de sa valeur.
Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a ainsi déclaré :
« Personne ne fournira de gaz gratuitement, c’est tout simplement impossible, et vous ne pouvez le payer qu’en roubles ».
De plus, la présidente de la chambre haute du parlement russe, Valentina Matviyenko s’est également exprimé à ce sujet. Il a déclaré que si l’Europe refusait d’acheter de l’énergie Russe, le pays pouvait rediriger les approvisionnements vers les marchés asiatiques.
L’Europe s’oppose à ces sanctions
En effet, les pays européens affirment que la Russie n’a pas le droit de redéfinir les contrats. Ainsi, le groupe des nations du G7 a rejeté les demandes de Moscou cette semaine. Par ailleurs, les pays du G7 ont exhorté les entreprises à ne pas accepter les paiements en roubles. Ils ont également précisé que la plupart des contrats d’approvisionnement stipulaient euros ou dollars.
De la même manière, la Commission européenne a déclaré partager la position du G7 concernant ce point. Elle a également affirmé qu’elle évaluait des scénarios incluant l’arrêt total d’importations de gaz russe l’hiver prochain.
À noter que les prix de gros du gaz en Europe ont encore augmenté cette semaine en raison des craintes d’un arrêt des approvisionnements. La Russie respecte encore ses obligations contractuelles pour le moment cependant.
Des dommages considérables pour l’Europe
L’Europe reçoit environ 40 % de son gaz de la Russie. Les importations se sont élevées à environ 155 milliards de mètres cubes (mmc) l’année dernière.
L’Allemagne en première ligne
La demande de Poutine a alimenté les craintes de l’Allemagne, première économie européenne fortement dépendante du gaz russe. Le pays craint ainsi fortement les perturbations potentielles et leur impact à venir sur les industries et les ménages.
Leonhard Birnbaum, directeur général d’E.ON a déclaré que l’économie allemande risquait de subir des « dommages massifs, qui devraient être évités si possible ». Il estime que le pays a besoin de 3 ans pour devenir indépendante du gaz russe. Il a également donné son point de vue sur la manière dont la crise devait être gérée en Allemagne et plus globalement en Europe.
Selon lui, le régulateur du réseau gazier allemand donnerait la priorité au chauffage des habitations par rapport à l’utilisation industrielle.
La réponse européenne
Les données de Gas Infrastructure Europe montrent que les sites de stockage de gaz de l’Union européenne sont actuellement remplis à 26 %. Ce chiffre souligne le défi que représente le remplacement de la Russie en tant que fournisseur d’énergie.
Markus Krebber, PDG de RWE a d’ailleurs déclaré que l’Allemagne ne pourrait faire face à un arrêt complet des importations de gaz russe que pendant une très courte période.
Pour répondre à ce défi, la Commission européenne a proposé une législation. Elle exige que les pays de l’Union Européenne remplissent les sites de stockage à au moins 80 % cette année. Par ailleurs, l’analyste Refinitiv a délivré un rapport relatif au stockage de l’UE. Il estime ainsi que ces stocks s’établiraient à 23% en cas de rupture d’approvisionnement cet été.
Les analystes déclarent à ce sujet :
« Ces niveaux constituent une menace directe pour la sécurité de l’approvisionnement énergétique en Europe ».
Ils ajoutent que le stockage pourrait atteindre 58% si les transmissions de GNL du nord-ouest de l’Europe étaient maximisées. Cela impliquerait également une augmentation des importations en provenance de fournisseur alternatif. Précisons toutefois que ce chiffre reste faible et bien insuffisant.
Enfin, rappelons également que Washington et Bruxelles ont conclu la semaine dernière un accord prévoyant que les États-Unis fournissent 15 milliards de m3 de GNL cette année. Cela ne suffira cependant pas à remplacer totalement les importations de gaz russe.