Cet été marque un tournant majeur dans les échanges de diesel entre la côte du Golfe des États-Unis (USGC) et l’Europe. En juillet 2024, les flux de diesel ont atteint 10,6 millions de barils transportés à destination de l’Europe du Nord-Ouest et de la Méditerranée, un record absolu. En août, ce chiffre est encore dépassé avec 12,5 millions de barils, confirmant une tendance haussière sans précédent. Ce niveau d’exportations s’explique principalement par des tarifs de fret en baisse, créant une opportunité pour les traders d’exploiter l’arbitrage entre les deux régions.
Ces flux records sont le reflet de la montée en puissance de la capacité de production des raffineries américaines, qui tournent à des niveaux de près de 93 % de capacité depuis le début de l’été. En juillet, la production de diesel dans la région de l’USGC a atteint 3 millions de barils par jour, alimentant des stocks domestiques en hausse et contribuant à l’explosion des exportations vers l’Europe et l’Amérique latine.
Le Brésil, nouvel acteur clé dans les exportations de diesel
En parallèle de ces flux transatlantiques, le Brésil est devenu un marché de plus en plus important pour les exportations américaines de diesel. En août, les volumes d’exportation de l’USGC vers le Brésil ont bondi, atteignant 1,7 million de barils, contre seulement 300 000 en février 2024. Cette évolution a renforcé la présence américaine dans un marché historiquement dominé par la Russie, qui reste le principal fournisseur de diesel au Brésil avec plus de 75 % des parts de marché.
Cependant, une concurrence s’installe entre le diesel américain et celui en provenance de Russie. L’écart de prix entre les cargaisons russes et celles de l’USGC s’est réduit au cours du second semestre 2024, passant de 6,19 dollars par baril à 4,36 dollars, rendant le diesel américain plus compétitif sur le marché brésilien. Cette situation est particulièrement surveillée par les acteurs du marché, bien que la Russie continue de jouer un rôle dominant.
Un marché marqué par la volatilité des taux de fret
Les fluctuations des taux de fret pour les pétroliers propres ont été l’un des facteurs clés derrière l’augmentation des exportations de diesel de l’USGC vers l’Europe et l’Amérique latine. Après avoir connu une volatilité importante, les taux de fret sont passés de 57,99 $/tonne métrique en juin à environ 30,30 $/tonne métrique en août. Cette baisse des coûts de transport a permis d’ouvrir des opportunités d’arbitrage pour les traders, qui ont rapidement affrété des navires, contribuant ainsi à une hausse des volumes transportés.
En dépit de cette volatilité, les raffineries américaines ont continué à produire à un rythme soutenu. Avec des taux d’utilisation atteignant 93 % de la capacité, la production de diesel s’est maintenue à un niveau élevé, soutenue par la demande croissante à l’international. Toutefois, cette tendance pourrait s’inverser à l’approche de la saison de maintenance des raffineries, prévue pour l’automne, entraînant une diminution des exportations.
Le marché domestique américain sous pression
Alors que les exportations américaines de diesel continuent de croître, le marché domestique de l’USGC est marqué par des prix bas qui limitent les opportunités d’arbitrage entre les différentes régions des États-Unis. En août, le diesel de la côte du Golfe des États-Unis se vendait à un prix inférieur de 11,40 cents par gallon par rapport aux contrats NYMEX, son plus bas niveau depuis janvier. Sur la côte Est des États-Unis, le diesel a atteint un creux de deux ans, avec un prix inférieur de 5 cents par gallon par rapport au NYMEX.
Malgré ces écarts de prix, les coûts de transport entre les différentes régions du pays ont empêché les traders de tirer parti de ces opportunités d’arbitrage. Les acteurs du marché estiment que la demande domestique reste limitée en raison des prix bas dans certaines régions du pays, ce qui favorise l’exportation vers des marchés plus lucratifs comme l’Europe et le Brésil.
Perspectives du marché brésilien
Le marché brésilien du diesel, qui connaît une croissance soutenue, pourrait jouer un rôle crucial dans les futures exportations américaines. En juillet, les ventes au détail de produits raffinés au Brésil ont atteint 6,05 milliards de litres, contre 5,67 milliards en juin. Les ventes de diesel, qui ont augmenté de 4 % au cours du premier semestre 2024 pour atteindre 38,55 milliards de litres, témoignent de la robustesse de la demande sur ce marché.
Les analystes estiment que la croissance du PIB brésilien de 2,2 % en 2024 pourrait encore stimuler la demande de diesel, chaque point de pourcentage de croissance économique étant associé à une augmentation significative de la consommation de carburant. Cette croissance du marché brésilien pourrait compenser la baisse prévue des exportations de diesel de l’USGC à l’approche de l’automne.