Aux États-Unis, pour la première fois, deux entreprises énergétiques prévoient de redémarrer des centrales nucléaires précédemment mises à l’arrêt. Cette initiative vise à répondre à la demande croissante d’électricité dans le pays, tout en optimisant les coûts et les délais par rapport à la construction de nouvelles installations.
Constellation Energy annonce son intention de remettre en service un réacteur de la centrale de Three Mile Island en Pennsylvanie d’ici 2028. Ce site est connu pour l’incident nucléaire de 1979, le plus grave de l’histoire américaine, mais le réacteur concerné n’était pas impliqué dans cet événement. Parallèlement, Holtec travaille à la réactivation de la centrale de Palisades dans le Michigan, avec un objectif de redémarrage fin 2025.
Un choix stratégique face à la demande énergétique
Selon l’Energy Information Administration (EIA), la consommation d’électricité aux États-Unis devrait augmenter de 15 % entre 2022 et 2050, en raison notamment de l’électrification croissante des transports et de l’industrie. Face à cette projection, le redémarrage de centrales nucléaires existantes est perçu comme une solution rapide et économiquement viable pour accroître la capacité de production sans délai excessif.
Le projet de Constellation Energy s’inscrit dans un contrat de fourniture d’électricité de 20 ans avec Microsoft, reflétant l’intérêt des grandes entreprises technologiques pour des sources d’énergie stables et fiables. De son côté, Holtec a déposé une demande auprès de la Nuclear Regulatory Commission pour reprendre l’exploitation de Palisades, ce qui constituerait une première aux États-Unis en matière de réactivation de centrale nucléaire.
Des coûts maîtrisés pour une capacité accrue
Les coûts associés au redémarrage de ces centrales sont nettement inférieurs à ceux de la construction de nouveaux réacteurs. Holtec estime l’investissement nécessaire pour Palisades à environ deux milliards de dollars, tandis que Constellation Energy prévoit un budget de 1,6 milliard de dollars pour Three Mile Island. En comparaison, la construction des deux nouveaux réacteurs de la centrale de Vogtle en Géorgie, entamée en 2009, a nécessité plus de 30 milliards de dollars et a connu de nombreux retards.
Cette différence de coûts s’explique par le fait que les infrastructures principales des centrales existantes sont déjà en place. Les entreprises peuvent ainsi concentrer leurs investissements sur la modernisation des équipements et la mise en conformité avec les normes actuelles. Cette approche permet de réduire significativement les délais de mise en service, un avantage majeur dans un contexte de demande énergétique croissante.
Défis techniques et réglementaires
Le redémarrage de centrales nucléaires fermées soulève cependant des défis techniques et réglementaires. Les installations concernées, mises en service dans les années 1970, doivent être modernisées pour respecter les normes de sécurité actuelles, notamment en matière de systèmes de refroidissement, de contrôle-commande et de résistance aux événements naturels ou accidentels.
Les entreprises doivent obtenir l’approbation de la Nuclear Regulatory Commission (NRC), qui impose des procédures strictes pour garantir la sûreté nucléaire. Cela inclut des inspections approfondies, des tests de performance et des évaluations des plans de gestion des déchets. Selon des experts du Massachusetts Institute of Technology (MIT), ces défis sont surmontables grâce à l’expérience accumulée dans le secteur et aux avancées technologiques.
Perspectives pour le secteur nucléaire
Ces initiatives pourraient encourager d’autres acteurs du secteur nucléaire à envisager des projets similaires. NextEra Energy Resources examine la possibilité de relancer la centrale de Duane Arnold en Iowa, fermée en 2020. Bien qu’aucune décision officielle n’ait été prise, cette réflexion témoigne de l’intérêt croissant pour l’exploitation de l’infrastructure nucléaire existante.
Le soutien du gouvernement fédéral joue un rôle clé dans ces projets. Holtec a obtenu un prêt de 1,5 milliard de dollars du Department of Energy pour financer le redémarrage de Palisades. Cette implication reflète la volonté des autorités de diversifier le mix énergétique national et de renforcer la sécurité d’approvisionnement en électricité.
Le redémarrage de centrales nucléaires existantes offre une opportunité de répondre rapidement aux défis énergétiques actuels. En exploitant des infrastructures déjà présentes, les États-Unis peuvent augmenter leur capacité de production électrique tout en maîtrisant les coûts et les délais. Cette stratégie pourrait influencer les orientations futures du secteur, en complément des investissements dans les énergies renouvelables et les technologies émergentes.