Le gouvernement de Giorgia Meloni, qui a placé plusieurs de ses fidèles à la tête des entreprises publiques, fait face à une fronde inédite d’une partie des actionnaires d’Enel contre son candidat pour le poste de président du géant italien de l’énergie. L’assemblée générale des actionnaires, réunie mercredi à Rome, est appelée à voter sur trois listes de candidats, dont celle du ministère de l’Economie qui détient 23,6% d’Enel.
L’Etat italien soutient la candidature à la présidence du conseil d’administration de Paolo Scaroni, président du club de football de l’AC Milan, un proche de Silvio Berlusconi qui a été PDG d’Enel 2002 à 2005. Ce personnage controversé a été souvent critiqué pour ses liens étroits avec Moscou qu’il avait noués pendant son mandat de PDG du groupe italien des hydrocarbures Eni qui avait pris fin en 2014. En septembre 2022, M. Scaroni, 76 ans, avait dénoncé « l’escalade des sanctions » à l’égard de la Russie décidées par l’Occident dans le sillage de l’invasion de l’Ukraine par les troupes de Moscou.
La fronde des actionnaires est menée par le fonds d’investissement Covalis Capital qui propose comme président le banquier italien Marco Mazzucchelli pour contrer l’influence du gouvernement ultra-conservateur au sein d’Enel. Zach Mecelis, fondateur de Covalis qui détient environ 1% d’Enel, a dénoncé « l’opacité du processus » de choix des candidats du gouvernement et a indiqué présenter une liste qui « reflète mieux l’ADN international de l’entreprise ».
Sur la liste du gouvernement figure aussi Flavio Cattaneo, 59 ans, vice-président exécutif de l’opérateur ferroviaire privé Italo-NTV, qui serait lui appelé à remplacer Francesco Starace, PDG d’Enel depuis 2014 et dont le troisième mandat arrive à échéance. Sous l’impulsion de M. Starace, Enel a été l’un des premiers groupes du secteur de l’énergie à prendre le virage du développement durable, un engagement très poussé qui ne figure guère en haut de l’agenda du gouvernement Meloni. M. Starace s’est déclaré prêt à faciliter la transition avec la future direction, mais a assuré ne pas être disponible pour un nouveau mandat de trois ans.
Glass Lewis, l’une des grandes sociétés américaines de conseil aux actionnaires, soutient la troisième liste, celle présentée par Assogestioni, qui regroupe des investisseurs institutionnels italiens, mais préfère comme président M. Mazzucchelli. Jugeant que l’issue du vote était incertaine, Glass Lewis estime que M. Mazzucchelli serait mieux à même de préserver l’indépendance du conseil d’administration et de contrebalancer la présence du PDG choisi par le gouvernement.
Le fonds souverain de la Norvège, qui possède 2,2% d’Enel, défend également la candidature de M. Mazzucchelli. Le plus gros fonds au monde a indiqué vendredi au Financial Times « soutenir les candidats présentés par les actionnaires minoritaires afin de renforcer l’indépendance du conseil d’administration ».