EDF est sous pression depuis des années concernant ses rejets d’eau douce dans l’étang de Berre, un enjeu environnemental qui affecte la plus grande lagune méditerranéenne française. Le Groupement d’intérêt public pour la réhabilitation de l’étang de Berre (Gipreb) a dénoncé les effets écologiques négatifs des volumes d’eau rejetés par EDF, entraînant notamment des dysfonctionnements de l’écosystème local. En réponse, EDF a accepté de revoir la gestion de ses rejets et de conclure un accord avec le Gipreb pour mieux répartir les volumes en fonction des saisons.
Cette eau douce, dérivée de la Durance pour alimenter une chaîne de le réseau de production hydraulique de la région, finit sa course dans l’étang de Berre après avoir été turbinée par le réseau de production hydraulique. Les rejets avaient déjà été limités à 1,2 milliard de m³ par an suite à une condamnation de la France par la Cour européenne de justice en 2004. Cependant, leur impact demeure significatif, en particulier durant les périodes estivales, où l’apport d’eau douce dans un milieu salin provoque des déséquilibres chimiques pouvant mener à des phénomènes d’asphyxie pour les espèces aquatiques.
Un accord pour une gestion plus flexible
Le nouvel accord vise à ajuster les volumes d’eau en fonction des besoins écologiques tout en préservant la production électrique. EDF a accepté de suspendre ses rejets durant les mois critiques de juin, juillet et août, lorsque le risque d’asphyxie est le plus élevé. En contrepartie, des dérogations sont possibles pour assurer la continuité de la production, notamment lors des périodes de forte demande ou pour des raisons de sécurité du réseau.
Selon Didier Khelfa, maire de Saint-Chamas et président du Gipreb, cette gestion plus fine permettra de réduire les risques pour l’écosystème tout en répondant aux impératifs de production d’électricité. EDF s’engage également à financer un programme de suivi environnemental sur quatre ans pour évaluer l’impact de ces nouvelles mesures. Ce programme devra fournir des données précises sur l’évolution de la qualité de l’eau et l’état de la biodiversité locale.
Dérogations encadrées et suivi environnemental
Malgré cet accord, le cadre réglementaire autour des rejets reste souple. EDF conserve la possibilité d’ajuster les volumes rejetés en fonction des conditions de production ou pour assurer la sécurité énergétique régionale. Cette flexibilité, bien que nécessaire pour un acteur de cette envergure, devra être suivie de près par le Gipreb, qui a prévu un contrôle continu des rejets et des impacts environnementaux.
Le financement du programme de suivi, estimé à plusieurs millions d’euros, constitue l’un des points clés de cet accord. Il s’agit de garantir que les ajustements réalisés en termes de rejets ne se limitent pas à une simple adaptation saisonnière, mais qu’ils s’inscrivent dans une démarche de gestion durable sur le long terme. Les résultats de ce suivi permettront de déterminer si des ajustements supplémentaires seront nécessaires.
Vers une valorisation accrue de l’eau douce
Le contexte de sécheresse récurrent dans le sud de la France a relancé le débat sur la valorisation de cette eau rejetée par EDF. Plusieurs alternatives ont été envisagées avec les acteurs locaux, dont l’utilisation de cette eau pour l’irrigation des terres agricoles, la recharge des nappes phréatiques, ou encore son détournement vers des circuits industriels. La mise en place de telles infrastructures pourrait permettre de mieux valoriser la ressource tout en réduisant les rejets directs dans l’étang.
Ces solutions, encore en phase d’étude, représentent un potentiel levier pour répondre à la demande croissante en eau dans la région tout en atténuant les tensions entre production électrique et préservation des milieux naturels. Toutefois, la complexité des aménagements nécessaires, notamment en termes de construction de nouveaux canaux et de gestion des flux, pourrait ralentir leur mise en œuvre.