EDF annonce l’arrêt définitif de la production d’électricité à la centrale thermique de Cordemais d’ici 2027. Le groupe renonce ainsi à son projet de conversion à la biomasse, connu sous le nom d’Eco-Combust, qui visait à remplacer le charbon par des granulés de bois pour maintenir une activité énergétique. Selon les responsables d’EDF, les conditions économiques n’étaient pas réunies pour rendre ce projet viable. Les coûts liés à l’achat de pellets de bois et la durée de l’engagement avec son partenaire Paprec ont été jugés trop élevés, rendant la reconversion financièrement insoutenable. EDF estimait que les pertes potentielles sur ce projet se chiffreraient en centaines de millions d’euros.
Cette décision intervient dans un contexte où le groupe doit ajuster sa stratégie pour respecter les objectifs énergétiques nationaux, tout en tenant compte de l’évolution du mix énergétique. Le groupe s’appuie de plus en plus sur ses installations nucléaires, avec la mise en service de l’EPR de Flamanville et une disponibilité accrue du parc nucléaire existant, réduisant ainsi la nécessité de maintenir des centrales thermiques.
Impacts sociaux et industriels à venir
La centrale de Cordemais, qui emploie actuellement environ 500 personnes, dont 340 en emploi direct, verra la majorité de ses activités cesser d’ici 2027. Pour limiter l’impact social de cette fermeture, EDF prévoit un accompagnement des salariés tout au long du processus. Des solutions de reclassement sont envisagées, notamment au sein de la filiale Framatome, qui devrait reprendre une partie du site pour la production de composants destinés aux centrales nucléaires. Cette nouvelle activité pourrait créer environ 200 emplois à terme, mais cela ne compensera pas totalement les pertes d’emplois liées à la fermeture de Cordemais.
Le groupe assure qu’aucun licenciement sec n’est à prévoir. Les départs en retraite anticipée, les mutations vers d’autres sites d’EDF ou la reconversion interne sont des pistes actuellement discutées avec les partenaires sociaux. Toutefois, les syndicats, notamment la CGT et la CFE-CGC, dénoncent une désillusion pour les salariés qui espéraient voir le site évoluer vers une production décarbonée. Selon eux, l’abandon du projet Eco-Combust remet en cause plusieurs années d’efforts pour engager la centrale dans un processus de transformation énergétique.
Conséquences pour l’équilibre énergétique régional
La fermeture de Cordemais ne se limite pas à un enjeu social ou industriel, elle soulève également des questions sur l’équilibre énergétique de la région Grand Ouest. Jusqu’à présent, la centrale jouait un rôle clé dans la stabilisation de l’approvisionnement électrique, notamment lors des pics de consommation hivernaux. En septembre 2023, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité (RTE) recommandait encore le maintien en fonctionnement de Cordemais pour répondre à l’offre et la demande électrique dans cette zone.
Le recours croissant à l’énergie nucléaire et le développement des énergies renouvelables devront compenser la disparition de cette source d’énergie thermique. Le rôle des centrales à gaz, plus flexibles, pourrait aussi devenir plus important pour garantir la sécurité énergétique régionale.
Un signal pour les autres centrales à charbon en France
L’arrêt de Cordemais marque une étape importante dans la sortie progressive du charbon en France. La centrale de Saint-Avold, en Moselle, propriété de GazelEnergie, reste la dernière autre installation de ce type encore en activité dans le pays. Elle est elle aussi engagée dans un projet de conversion, mais l’abandon de Cordemais pourrait susciter des inquiétudes quant à l’avenir de ce site.
Les syndicats de Saint-Avold ont d’ailleurs demandé un rendez-vous avec la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, pour clarifier les perspectives du projet de reconversion. La France, qui s’est fixée comme objectif de fermer ses centrales à charbon d’ici 2027, doit néanmoins veiller à maintenir un équilibre entre ses engagements climatiques et les impératifs de sécurité énergétique.
L’abandon du projet de Cordemais reflète la complexité de la transition énergétique en France, où les impératifs économiques et sociaux s’entremêlent avec les priorités industrielles et environnementales. EDF, de son côté, continue d’ajuster son parc énergétique pour répondre aux besoins en électricité tout en respectant les objectifs de décarbonation fixés par le gouvernement.