Économie circulaire et énergies renouvelables fonctionnent de pair dans un monde énergétique en pleine mutation structurelle. L’accélération de la construction de parcs d’énergie renouvelable amène la question de leur recyclage et de leur valorisation en fin de vie. Pour l’heure, quelques géants du secteur proposent des solutions fonctionnelles. Mais dans l’ensemble, où en est-on de la mise en place d’une économie circulaire dans les énergies renouvelables ?
L’économie circulaire pour minimiser l’impact environnemental des énergies renouvelables
Les énergies renouvelables ont connu un véritable essor depuis les années 2000, estimées plus écologiques que les autres. Concernant la production d’énergie, leur impact environnemental est effectivement plus faible. Mais qu’en est-il de leur cycle de vie entier ?
L’analyse du cycle de vie estime les impacts environnementaux d’un produit sur l’ensemble de son cycle de vie. Extraction, traitement des matières premières ainsi que processus de fabrication. Mais aussi transport, distribution, utilisation, réutilisation, recyclage ainsi que gestion des déchets. L’analyse permet de dresser un bilan carbone moyen, et ainsi de comparer les différentes énergies.
Les énergies renouvelables ne sont pas neutres en carbone
L’énergie éolienne affiche un score de 12,7g CO2eq/kW, le solaire 55g CO2eq/kWh et l’hydraulique, 6g CO2eq/kWh. À titre de comparaison, le bilan carbone de l’électricité fossile s’élève à 1060 gCO2eq/kWh. Les énergies renouvelables produisent moins d’émissions de CO2, mais le bilan carbone n’est pas neutre pour autant.
En cause, des équipements électriques et électroniques difficiles à valoriser. Une question longtemps ignorée. Mais depuis peu les consciences s’éveillent, pour une énergie solaire et éolienne plus propre.
En ce sens, les panneaux photovoltaïques doivent, depuis 2019, être recyclés à 80% et valorisés à 85%. Quant aux éoliennes, leur recyclage sera obligatoire dès 2023.
Recycler 1500 éoliennes d’ici à 2026
Le marché de l’éolien devrait s’amplifier dans les prochaines années. Avec une croissance estimée à 3% par an, le secteur pourrait produire 43 millions de tonnes de déchets d’ici 2050.
Ce recyclage des éoliennes implique donc leur démantèlement, que le Code de l’environnement régule. Les exploitants doivent provisionner 50 000€ par machine de 2 MW, avec un ajout de 10 000€ par MW, depuis 2020. Des sommes importantes, pour un démantèlement qui concernerait plus de 1 500 éoliennes d’ici 2026.
Certaines entreprises comme Suez, Vestas et Aker s’engagent déjà sur la question. Les firmes objectivent ainsi de recycler davantage, de produire des éoliennes zéro déchet. À Port-la-Nouvelle en Occitanie, Suez valorise déjà les éoliennes à plus de 98%.
90% d’une éolienne est recyclable
Plus de 90% du poids des éoliennes – acier, béton, cuivre et aluminium – se recyclent. Le mat, le rotor et les fondations sont recyclables, mais deux problèmes se posent. Les aimants permanents contenant des terres rares, ont une extraction qui reste polluante pour l’instant. Le recyclage des pales d’éoliennes interrogent également.
Valoriser 52.000 pâles d’éoliennes à horizon 2030
Les pales d’éoliennes représentent 6% du poids de l’éolienne. Avec leur composition de résine, composite et fibres de verre ou carbone, chauffés pour être fusionnés, leur recyclage est difficile.
Or, selon WindEurope, la situation se détériorera en Europe ces prochaines années. D’un peu moins de 9.000 tonnes de pales annuelles à éliminer en 2020, on passerait alors à 14.000 en 2023. Puis 25.000 tonnes annuelles en 2025, pour arriver à 52.000 tonnes par an à l’horizon 2030.
Utiliser les composites comme combustible ?
Des travaux de recherche en économie circulaire sont menés par une coalition d’industriels et d’universitaires pour mieux concevoir et valoriser ces éléments. Par exemple, utiliser le composite comme combustible en cimenterie, pour l’incorporer dans des produits BTP. La récupération des fibres de carbone peut s’effectuer par pyrolyse, décomposition chimique à très haute température.
Pour Vestas, il s’agira de séparer les fibres de l’époxy, afin de les recycler dans une filière de recyclage existante. Quant à l’époxy, il sera transformé pour devenir de la matière et recréer… de l’époxy.
Les Pays-Bas ont trouvé une autre solution : utiliser les pales d’éoliennes en guise de banc public, abribus ou encore aire de jeux. Cela permettrait ainsi au pays de valoriser pas moins de 400 pales par an.
Les panneaux solaires recyclables à 95%
À l’instar des pales d’éoliennes, la difficulté posée au recyclage des panneaux solaires réside dans la séparation des composants. Entre cadre en aluminium, verre, cellules, plastique, connexions en cuivre ou argent, silicium cristallin. Et ce, pour environ 90% des installations.
En France, c’est PV Cycle qui gère l’étape du recyclage. La firme dispose de plus de 200 points de collecte de panneaux solaires usagés sur tout le territoire. Les panneaux sont ensuite acheminés dans la première usine de recyclage de panneaux photovoltaïques à grande échelle, gérée par Veolia.
La procédure utilisée est rigoureuse et efficace. Une fois le cadre retiré, les éléments sont broyés, séparés, puis recyclés dans leurs filières ; à l’exception du plastique. Cela permet de recycler environ 94,7% des composants d’un panneau solaire, du moins pour la majorité d’entre eux.
Un recyclage différent pour les panneaux solaires à « couches minces »
Par ailleurs, environ 10% des panneaux solaires, dits « à couches minces », demandent un recyclage un peu différent. Ceux-ci sont composés de silicium amorphe ou d’autres matériaux semi-conducteurs complexes (indium, gallium, sélénium, etc). Ces panneaux solaires subissent un premier traitement chimique, puis sont broyés pour l’extraction des matériaux. Ils sont ensuite retraités pour devenir des matériaux secondaires.
Économie circulaire : vers un monde idéal ?
L’économie circulaire n’a rien de novateur puisqu’elle s’inspire directement des écosystèmes naturels. Écosystèmes dans lesquels le concept de déchet n’existe pas. Le modèle repose sur des boucles de valeur positives créées à chaque (ré)utilisation de la matière ou du produit. Ce, jusqu’à sa destruction finale.
Cela implique de rallonger les flux de matière, de produits, tout au long de leur cycle de vie. Découpler la croissance économique de l’épuisement des ressources naturelles en créant des produits, services, modèles d’affaire et politiques publiques innovants. Le site de l’Ademe préconise notamment : « Réparer d’abord, Réutiliser ensuite, Recycler enfin ».
$380 milliards d’économie en matière première grâce à l’économie circulaire
La transition vers une économie circulaire permettrait une création de valeur économique, sociale et environnementale. Soit les trois piliers du développement durable. Le cabinet McKinsey évalue ainsi à 380 milliards de dollars annuels l’économie réalisée en matières premières en Europe grâce à l’économie circulaire. Un modèle de relocalisation de la consommation et de la production via le déploiement de nouvelles filières dédiées.
Une manière d’envisager un avenir meilleur, quand les crises sociales, économiques et climatiques touchent de nombreux États. L’économie circulaire paraît représenter le modèle économique idéal pour une société durable : utopie ou réalité, les prochaines décennies seront décisives.