E.ON a annoncé le 1 juillet avoir mis en service, avec MM Neuss, la première centrale de cogénération à grande échelle d’Europe entièrement automatisée. L’installation, située sur le site cartonnier de Neuss, alimente l’usine en électricité et en chaleur à la demande du marché grâce à la solution de contrôle E.ON IQ Energy. Le système ajuste la production en temps réel selon les prix de gros et les besoins industriels. E.ON prévoit d’exploiter la centrale jusqu’en 2045.
Automatisation et pilotage
La plateforme E.ON IQ Energy relie la turbine, les procédés de production et le raccordement au réseau pour optimiser chaque cycle sans présence humaine pendant 72 heures consécutives. L’algorithme lance, arrête ou module la charge en fonction des signaux de prix et des contraintes techniques, ce qui permet un fonctionnement entièrement non supervisé. Cette configuration, inédite à cette échelle sur le continent, vise à concilier fiabilité opérationnelle et compétitivité énergétique. Les données sont enregistrées en continu afin d’améliorer la maintenance prédictive.
La direction d’E.ON Energy Projects GmbH voit dans ce modèle un jalon pour l’approvisionnement industriel. « En combinant cogénération, numérisation et compatibilité hydrogène, nous instaurons une référence pour les sites de production », a déclaré Manfred Wirsing, membre du directoire, dans un communiqué. MM Neuss partage cette perspective : « La modernisation garantit une efficacité élevée et une plus grande autonomie énergétique », a affirmé Thomas Knapp, directeur général de l’usine. Les deux entreprises estiment que la nouvelle configuration contribue à la neutralité climatique visée pour 2040.
Performances et redondance
Le cycle combiné gaz-vapeur fournit 22 mégawatts d’électricité et 59 mégawatts de chaleur, atteignant un taux d’utilisation du combustible de 91 %. Par rapport à une production séparée, cela représente une baisse annuelle d’environ 22 000 t de CO₂. Une chaudière de secours entièrement automatisée assure le relais immédiat en cas de besoin, garantissant la continuité de l’alimentation du site. La redondance reflète la priorité accordée à la sécurité d’approvisionnement.
Les travaux ont débuté en septembre 2022 et se sont achevés en décembre 2024, conformément au calendrier initial. L’intégration de la centrale au marché de gros permet à l’opérateur de valoriser les excédents d’électricité lorsque la demande industrielle diminue. Cette approche réduit les coûts de production énergétique pour l’usine tout en stabilisant le réseau régional. Les responsables soulignent que la flexibilité obtenue provient avant tout de la couche logicielle et non d’investissements matériels supplémentaires.
Préparation à l’hydrogène
Dès sa conception, la turbine a été configurée pour admettre jusqu’à 10 % d’hydrogène dans le mélange gazeux sans modification majeure. L’ingénierie prévoit des adaptations progressives afin d’atteindre 100 % d’hydrogène lorsque l’approvisionnement le permettra. Cette compatibilité anticipe les exigences réglementaires attendues dans la prochaine décennie. Le projet illustre ainsi une stratégie d’investissement dans des actifs évolutifs plutôt que dans des technologies figées.
E.ON estime que la transition vers des volumes croissants d’hydrogène pourra réduire davantage les émissions tout en prolongeant la durée de vie économique de la centrale. L’entreprise rappelle que l’objectif interne de neutralité climatique reste fixé à 2040. La flexibilité intégrée à Neuss devrait, selon elle, faciliter le passage à de nouveaux vecteurs énergétiques sans interruption de service. « Le système agit déjà comme un banc d’essai pour la chaleur et la puissance bas-carbone », a conclu M. Wirsing.