Francisco Campos, agriculteur à Lopera, dans le sud de l’Espagne, observe avec inquiétude ses oliviers centenaires que pourrait remplacer un parc photovoltaïque. Cette commune de 3 600 habitants, située à 200 kilomètres au nord-est de Séville, est au cœur d’une confrontation entre le secteur des énergies renouvelables et l’agriculture traditionnelle. L’Espagne, premier exportateur mondial d’huile d’olive, voit ses terres agricoles andalouses ciblées par des opérateurs comme Greenalia et FRV Arroyadas, désireux d’installer plusieurs centrales solaires sur près de 1 000 hectares.
Une filière agricole sous pression foncière
Les entreprises concernées, selon les habitants, ont déjà signé des accords de location couvrant la majorité des terrains visés, bien qu’elles n’aient pas répondu aux sollicitations de l’Agence France-Presse. Les autorités régionales andalouses envisagent des expropriations pour faciliter ces implantations, invoquant l’intérêt public. Une mesure contestée par les petits exploitants, qui dénoncent la perte de leurs moyens de subsistance. Rafael Alcalá, porte-parole de la Plateforme Campiña Norte contre les Méga-Centrales Solaires, estime à 100 000 le nombre d’oliviers menacés, contre 13 000 avancés par le gouvernement régional.
Mobilisation rurale face aux énergéticiens
Des dizaines d’agriculteurs ont récemment manifesté avec leurs tracteurs à l’entrée de Lopera, exprimant leur rejet des projets. Dans cette région, l’olivier représente la principale ressource économique. La coopérative locale La Loperana évalue à 2,2 mn EUR la perte annuelle si 500 hectares de cultures venaient à disparaître. María Josefa Palomo, retraitée, questionne l’avenir de son héritage familial tandis que Juan Cantera, jeune agriculteur, s’inquiète de l’impact intergénérationnel.
Défense institutionnelle et litige en cours
Le gouvernement régional andalou, par la voix de Jorge Paradela, conseiller régional à l’Industrie, défend la stratégie de développement solaire en précisant que moins de 1 % des surfaces concernées ont nécessité des expropriations. Le gestionnaire du réseau Red Eléctrica de España (REE) rappelle que 56,8 % de l’électricité espagnole provient désormais de sources renouvelables, dont 17 % via le solaire. L’Union photovoltaïque espagnole (Unef), représentant 800 entreprises, souligne les retombées fiscales positives pour les communes rurales.
Cependant, les habitants de Lopera, engagés dans une procédure judiciaire contre les sociétés et l’exécutif régional, dénoncent l’arrachage déjà constaté de 5 000 arbres sur des parcelles cédées. Face à l’expansion rapide du solaire, nombre d’entre eux entendent défendre leurs terres coûte que coûte.