Plusieurs ONG environnementales ont attaqué mardi devant la justice de l’UE le label « vert » accordé par la Commission européenne au gaz, Greenpeace déposant une plainte distincte dénonçant l’extension au nucléaire de cette classification des investissements jugés durables.
ClientEarth, le WWF, Transport&Environment (T&E) et l’organisation allemande BUND ont déposé devant la Cour de justice de l’UE une plainte contre le refus de Bruxelles d’éliminer le gaz de sa « taxonomie de la finance durable ». Ce texte, présenté par l’exécutif européen en janvier 2022 et adopté six mois plus tard, fixe les critères permettant de considérer comme « durables » des investissements, avec pour objectif d’orienter les fonds privés vers les activités réduisant les émissions de gaz à effet de serre.
Le texte inclut la production d’électricité nucléaire – qui n’émet pas de CO2 – et les centrales électriques au gaz parmi les investissements pouvant bénéficier de la finance verte, sous conditions et à titre transitoire, les jugeant nécessaires pour accompagner l’essor des énergies renouvelables intermittentes (éolien, solaire…) et la décarbonation du continent.
Or, « le gaz fossile est une source d’énergie à haute teneur en carbone lorsqu’il est brûlé (…) Son extraction et son transport entraînent également la libération de méthane », gaz à effet de serre au pouvoir réchauffant 80 fois plus puissant que le CO2 sur 20 ans, ont déploré les quatre ONG dans un communiqué commun. « C’est aussi absurde qu’illégal, cela sape fondamentalement la crédibilité de l’action climatique de l’UE. Le gaz n’est ni propre, ni bon marché, ni une source d’énergie sûre », font-elles valoir, pointant le risque « d’aggraver la dépendance de l’UE » aux énergies fossiles importées et onéreuses.
Cette taxonomie contrevient aux « obligations de l’accord de Paris » sur le climat et est en « contradiction avec les politiques d’institutions financières » publiques comme la Banque européenne d’investissement, ont-elles assuré, redoutant que le texte « canalise les investissements supplémentaires » vers le gaz au détriment des renouvelables.
De façon distincte, l’ONG Greenpeace a déposé mardi un recours devant la CJUE contre l’inclusion du gaz mais également du nucléaire dans la taxonomie des « investissements durables », dénonçant un « faux label » risquant de « détourner les financements verts de leurs objectifs ». « L’inclusion des activités nucléaires entraîne des dommages significatifs pour l’environnement, ce qui est expressément interdit » par la législation que la Commission était censée traduire avec cette classification, soutient Roda Verheyen, juriste de Greenpeace.
L’inclusion de l’atome civil dans la « taxonomie verte » avait vivement divisé les Vingt-Sept, suscitant l’opposition de l’Allemagne et d’une poignée de pays membres, dont l’Autriche et le Luxembourg – ces deux pays ont également saisi la CJUE sur ce point.