CrossBoundary Energy a sécurisé un financement senior de 200 M$ dans la seconde tranche d’un montage structuré par Standard Bank, avec un dispositif de garantie fourni par l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA). L’opération vise à accélérer le déploiement d’infrastructures solaires et de stockage pour des clients industriels, miniers et télécoms à travers un portefeuille d’actifs dans jusqu’à 20 pays africains.
Un modèle mutualisé à l’échelle continentale
Plutôt que de financer des projets isolés, la structure s’appuie sur un véhicule multi-actifs regroupant plusieurs installations commerciales et industrielles (C&I) telles que des centrales solaires pour sites miniers, des systèmes hybrides pour tours télécoms ou des toitures industrielles. Cette logique permet de réduire les coûts de transaction, de mutualiser le risque crédit entre différentes contreparties et d’obtenir des conditions de financement plus avantageuses grâce à l’effet de portefeuille.
Le dispositif de garantie de MIGA, d’un montant total de 495 M$, couvre les risques de restriction de convertibilité et de transfert de devises jusqu’à 15 ans. Il est complété par des mécanismes de première perte provenant de la fenêtre secteur privé de l’Association internationale de développement (IDA) et du Renewable Energy Catalyst Trust Fund, ciblant les marchés les plus fragiles.
Montage financier et implications bancaires
Standard Bank agit en tant qu’arrangeur principal pour cette facilité syndiquée, aux côtés d’Absa, Mauritius Commercial Bank et de plusieurs institutions financières de développement (DFIs), dont DEG et FMO. Du côté des instruments quasi-fonds propres, des engagements ont été obtenus auprès de Norfund, Impact Fund Denmark et Emerging Africa and Asia Infrastructure Fund.
La combinaison de dettes senior syndiquées, de capitaux publics en mezzanine et de garanties multilatérales permet à CrossBoundary Energy d’offrir des contrats d’achat d’électricité (PPA) sur 15 à 20 ans à des prix compétitifs pour les clients, tout en sécurisant les flux de trésorerie.
Exposition minière, télécoms et géographies cibles
Le portefeuille comprend notamment le projet Kamoa-Kakula en République démocratique du Congo, avec plus de 220 MW de solaire et un système de stockage de 526 MWh, fournissant 30 MW de puissance continue à la coentreprise minière Kamoa Copper. Le projet est opéré par Ivanhoe Mines, Zijin Mining et l’État congolais.
D’autres clients identifiés comprennent Rio Tinto à Madagascar pour une installation mixte éolienne et solaire, ainsi que plusieurs opérateurs de télécommunication en Sierra Leone. La plateforme MIGA cible une diversité de marchés allant de l’Afrique du Sud à l’Égypte, en passant par des États à faible revenu ou en situation de fragilité institutionnelle.
Risques de change et enjeux réglementaires
La principale barrière ciblée par le montage reste le risque de transfert de devises et de contrôle des capitaux, identifié comme un frein majeur au financement des infrastructures énergétiques privées. En transférant ce risque à une institution multilatérale, les banques participantes peuvent ajuster leur exposition et offrir des taux plus compétitifs.
Cependant, ce mécanisme exige une conformité stricte aux listes de sanctions internationales et aux standards environnementaux de la Banque mondiale, ce qui limite indirectement l’éligibilité de certains projets ou juridictions.
Impacts sectoriels et perspectives de réplication
L’approche contractuelle et financière de cette opération sert désormais de référence pour d’autres développeurs du secteur C&I en Afrique. Elle permet notamment de stabiliser les coûts d’électricité pour les industries isolées du réseau, souvent tributaires du diesel importé.
Dans un contexte où l’Afrique ne capte qu’une faible part des flux mondiaux en énergies renouvelables, l’opération pourrait favoriser la création d’un marché secondaire structuré autour des actifs C&I, incluant la titrisation et les obligations vertes.