Le gouvernement français n’a toujours pas publié la troisième Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), un texte stratégique pour la période 2025-2035. Initialement annoncée avant la fin de l’été, sa publication est à nouveau repoussée en raison de la crise politique en cours et des désaccords au sein même de l’exécutif. Le document est pourtant indispensable pour planifier les investissements liés au parc nucléaire et au développement des énergies renouvelables.
Une feuille de route suspendue à des enjeux politiques
Le décret devait marquer une rupture avec les orientations précédentes, en confirmant la relance du nucléaire via la construction de réacteurs de type EPR2 et en modifiant les objectifs de fermeture des anciennes centrales. Or, la division persistante entre partisans et opposants du nucléaire au sein du gouvernement a provoqué un blocage. Le ministre de l’Intérieur avait notamment demandé début juillet l’arrêt des aides publiques à l’éolien et au solaire, accentuant les tensions.
En parallèle, la proposition de loi Gremillet, soutenant la relance massive du nucléaire, doit encore être débattue au Parlement. Le risque de censure plane sur l’exécutif, notamment si le décret PPE est publié sans validation législative. Ce scénario est vivement contesté par certains groupes parlementaires, dont le Rassemblement national.
Des retards aux conséquences industrielles concrètes
Le secteur de l’énergie alerte sur les effets économiques du report. Sans texte validé, les appels d’offre, les investissements et la planification des infrastructures ne peuvent avancer. Les industriels soulignent également l’impact sur les formations et les emplois liés aux futurs projets énergétiques. Le Premier ministre a reconnu la nécessité d’un nouveau cadre réglementaire pour débloquer les investissements attendus.
La dernière version du texte, suspendue fin juillet, maintenait les ambitions en matière de renouvelables mais avec un calendrier révisé. Elle devait également inscrire de manière plus explicite le programme de nouveaux réacteurs nucléaires, absent des précédents documents. Au ministère de l’Energie, on plaide pour une adoption avant le 8 septembre.
Un climat d’instabilité jugé toxique par les industriels
De nombreuses voix dans le secteur privé dénoncent l’inaction politique. Catherine MacGregor, directrice générale d’Engie, a pointé l’absence de cadre énergétique clair en France. Lors d’un événement organisé par le Mouvement des entreprises de France, elle a qualifié la situation de « torpillage », notamment en raison d’une « campagne anti-éolienne extrêmement forte ».
Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables, a également exprimé ses inquiétudes, relevant que l’absence de PPE empêche toute visibilité sur les projets à venir. Du côté d’EDF, l’entreprise ne fait aucun commentaire officiel, mais dans l’industrie nucléaire, l’absence de feuille de route est perçue comme un frein majeur à la mise en œuvre des objectifs de production.