La Colombie cherche à exploiter son potentiel en termes de production pétrolière. Or, les zones de conflits qui gangrènent le pays lui rendent la tâche complexe. Jeff Mower, rédacteur chez S&P Global Platts, revient sur ce phénomène.
La Colombie dépend du pétrole
L’économie de la Colombie dépend en grande partie de sa capacité à produire du pétrole. Le pays compte près de 450 champs pétrolifères. Les droits miniers sont détenus par l’État. En témoigne le monopole de la compagnie nationale Ecopetrol sur la production de pétrole. La Colombie est un pays qui souffre encore beaucoup de la corruption, de l’économie informelle et de la fraude fiscale.
12% du PIB
Or, l’exploitation pétrolière est une ressource essentielle. Son exploitation représente également la majorité des exportations. Globalement, l’industrie pétrolière représente actuellement 12% des revenus nationaux, 34% des investissements et 56% de toutes les exportations. Concrètement, c’est 79% de la production globale qui est exportée vers l’étranger. Tout ceci contribue à financer le budget de fonctionnement du gouvernement.
Toutefois, la Colombie connaît depuis quelque temps une crise énergétique. En effet, la diminution de la production de ressources fossiles fait suite à une diminution des réserves pétrolières. Les sites actuellement exploités devraient être épuisés d’ici à six ans. La production pétrolière a baissé de plus d’un million de barils par jour (b/j) en 2013 à 780.000 b/j en 2020. Selon les estimations de S&P Global Platts Analytics, cette production devrait baisser jusqu’à moins de 600.000 b/j en 2031.
Conflits avec les narcotrafiquants
Le pays connaît actuellement une récession économique sévère à la suite de la pandémie. Exploiter les ressources pétrolières pourrait être une solution pour relancer l’économie du pays. De nombreux politiciens se sont affirmés en faveur de l’augmentation de la capacité de production en tant que nécessité économique.
Or, les violences qui sévissent dans le pays limitent l’exploitation possible des ressources pétrolières. La région de Catatumbo en est un bon exemple. Elle possède des réserves de pétrole qui, selon les calculs, s’élèveraient à 17 millions de barils. Toutefois, celles-ci demeurent encore inexploitées. En effet, la région est aussi une des plus grandes productrices de coca. Elle est donc contrôlée par les groupes paramilitaires narcotrafiquants de la région.
L’impuissance gouvernementale
Le vice-ministre de l’énergie, Miguel Lotero Robledo, a exposé le nouveau plan du gouvernement. Il a tenu à préciser de nouveau que, pour sortir le pays de la crise, le développement de l’infrastructure pétrolière dans ces zones de conflit serait nécessaire. Or, le gouvernement est confronté à des actes de sabotage, d’extorsion, de vol et d’attaques de la part des criminels. Il semble donc particulièrement difficile de reprendre le contrôle de cette zone de non-droit.
Échec de l’accord de paix avec les FARC
Un accord de paix avait été signé en 2016 par le gouvernement colombien avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC). Cet accord était censé mettre fin aux violences endémiques. Le gouvernement s’était engagé à créer des infrastructures routières et électriques pour désenclaver la région. Or, le président actuel, Ivàn Duque, a retardé le projet et a préféré répondre aux groupes armés par la violence militaire.
En conséquence, l’économie locale demeure dépendante du commerce de la drogue et de la culture des feuilles de coca pour sa survie. Cette situation continue à entraîner de la violence, une forte instabilité et des guerres de gangs. L’entreprise Ecopetrol, seule opérationnelle dans la région, ne cesse de subir des attaques armées sur ses pipelines. Elle a même fini par suspendre ses activités d’extraction de gaz face à la menace des guérilléros.
Recourir aux IDE ?
Pour se sortir de cette situation de crise, la Colombie espère attirer des investisseurs étrangers. Cela permettrait de favoriser la croissance dans le pays en créant enfin les infrastructures nécessaires à la production. Toutefois, tant que le problème sécuritaire n’aura pas été résolu, ou du moins apaisé, le pays risque de rester dans ce cercle d’instabilité.