Le GNL quittant les terminaux par camion représente 30 % (22 millions de tonnes en 2021) du volume d’importation de GNL en Chine. C’est le volume le plus important au monde. Cependant, il s’agit d’un marché rapide avec peu de réglementations.
La Chine et le GNL transporté par camion
Contrairement à d’autres pays d’Asie du Nord, seul un cinquième de la consommation chinoise de gaz naturel est destiné à la production d’électricité. Sa consommation industrielle collective (y compris les engrais) représente 50 % de la consommation totale de gaz, selon l’Economics and Technology Research Institute de la RPC.
Le marché chinois du GNL transporté par camion n’est pas si différent que des produits échangés en vrac comme le charbon ou le fer. Les échanges se font dans les ports et sur la base de cargaisons importées. Ces transferts se réalisent à plusieurs endroits en Chine, chacun avec sa propre dynamique. En conséquence, il est difficile d’unifier un prix de transport.
Par exemple, à Guangzhou, il n’y a pas de connexion à des gazoducs venant d’ailleurs. Ainsi, la ville est entièrement dépendante du GNL. Par ailleurs, la demande de GNL transporté par camion provient de la production d’électricité, de l’industrie et du gaz de ville.
Les déséquilibres régionaux peuvent être si importants qu’ils peuvent attirer, occasionnellement, du GNL transporté par camion d’une partie du pays à l’autre. Les indices de référence du fret résolvent ce problème en reflétant l’ensemble d’un littoral ou de plusieurs sites.
Le commerce du GNL s’effectue par camion principalement en raison d’un manque d’infrastructures comme les gazoducs. Pourtant, il est presque toujours plus rentable à long terme de regazéifier et de transporter le gaz par gazoduc jusqu’à la demande.
Dans les régions où des infrastructures alternatives sont présentes, le commerce par camion a diminué. Aussi, le GNL est rarement stocké empêchant de prévoir des mouvements haussiers des marchés.
Les importateurs chinois ralentissent leur activité d’achat de GNL au comptant en hiver
Au cours de 16 des 24 derniers mois, les prix spot du GNL (représentés par le JKM) étaient inférieurs aux prix du GNL transporté par camion. De ce fait, cela permettait une importation et une revente rentables. Plusieurs raisons expliquent le découplage qui a eu lieu au cours de l’hiver 2021.
Diminution de la consommation
Dans un premier temps, les industriels de gaz en Chine ont commencé à consommer moins en raison des prix élevés. En cause, la concurrence pour la cargaison marginale de GNL spot entre les bassins du Pacifique et de l’Atlantique. Par conséquent, la réduction de la demande chinoise a provoqué un déséquilibre. Pourquoi ?
Car les importations de cargaisons sont convenues plusieurs mois avant que les ventes par camion n’aient lieu. Ainsi, il faut du temps pour que les volumes importés de GNL réagissent à la forte réduction de la demande.
En outre, les importateurs chinois de GNL se sont retirés des achats au comptant (30 à 40 % des importations de GNL du pays), plus coûteux que les contrats long terme liés au pétrole brut Brent. Le lien entre les prix du GNL au comptant et le GNL transporté par camion en Chine s’est affaibli. Par conséquent, les importations globales de GNL de la Chine ont commencé à baisser de manière significative. Ils chutent de plus de 15 % à environ 16,5 millions de tonnes.
Les contrats à long terme
La Chine domine les contrats long terme 2021 pour le GNL. Mais seulement environ 6 à 7 millions de mt des 35+ millions de mt de contrats à terme signés commencent en 2022.
Plusieurs scénarios sont envisageables. Les importations de GNL diminueront possiblement en 2022 en raison d’un manque de demande. Il est également probable que les prix spot du GNL baisseront et permettront à la demande variable industrielle chinoise de revenir. Ou encore, les prix locaux augmenteront pour répondre au marché international.
Les prix du GNL par camion dans le sud de la Chine sont en passe de dépasser les prix d’importations de GNL. Cette situation inédite permettrait des ventes rentables de GNL par camion.
Nécessité de repenser la tarification
Néanmoins, ces problèmes pourraient être résolus en reliant les prix des marchés comme celui du transport GNL par camion avec le prix du marché auquel la Chine est confrontée pour importer du GNL.
Pourtant, le modèle d’utilisation des prix internationaux du GNL dans les contrats gaziers chinois existe déjà. Par exemple, la société chinoise Sinopec a introduit la tarification du GNL au comptant dans ses ventes de GNL par camion en faisant référence au JKM dans ses offres.
Ce modèle de tarification permet à des vendeurs comme BP China d’importer du GNL à des prix spot internationaux. Puis de revendre du gaz sur les marchés en aval par une méthode « back-to-back ». En somme, cela garantit le blocage d’une marge positive.
La consommation de gaz de la Chine devrait atteindre 430 à 450 milliards de mètres cubes d’ici 2025, contre 395 milliards de mètres cubes en 2022. Ainsi, les importations ponctuelles de GNL continueront de jouer un rôle important dans les efforts du pays pour se décarboniser.
En résumé, répercuter les coûts d’importation sur les marchés comme le GNL transporté par camion serait la clé pour assurer un approvisionnement en gaz suffisant et stable aux utilisateurs non résidentiels lors des pics de demande résidentielle. De cette manière, les importateurs chinois de GNL effectueront des achats supplémentaires réduisant la pression sur les marges pour eux. Cela permettrait également au secteur de l’électricité en Chine d’évoluer vers des mécanismes d’équilibrage davantage axés sur le marché.