Les cellules solaires sont en plein boum technologique. Déjà les innovations ont permis un bon d’efficacité, notamment grâce aux pérovskites. Avec l’European Perovskite Initiative, l’Europe souhaite peser dans la bataille internationale sur le développement des cellules photovoltaïques à base de pérovskite. La Chine, les États-Unis et l’Europe se positionnent, tous cherchant le leadership sur la nouvelle génération de panneaux photovoltaïques, dans un monde en mutation énergétique.
Le photovoltaïque se tourne vers les pérovskites
Les cellules à base de silicium ont atteint leurs limites
L’European Perovskite Initiative symbolise un changement structurel majeur dans l’industrie solaire au détriment des cellules à base de silicium. Ces dernières semblent en effet avoir atteint leurs limites en matière d’efficacité et de coûts. L’efficacité des cellules à silicium stagne ainsi depuis plusieurs années aux alentours des 27 %. De plus, les coûts de ces cellules sont sur le point d’atteindre un plateau.
Ces problèmes d’efficacité et de coût limitent sérieusement l’expansion pourtant nécessaire du solaire dans les prochaines années. Rappelons que pour respecter l’Accord de Paris, il faudra installer 8000 GW d’installations solaires représentant 1/4 du mix énergétique global. À l’heure actuelle, les performances technologiques des cellules à silicium ne permettent pas d’atteindre cet objectif.
Tous les regards se tournent vers les pérovskites
Confrontés aux limites des cellules traditionnelles, les industriels se tournent de plus en plus vers les pérovskites. Ces derniers sont des composants minéraux qui absorbe la lumière permettant des taux élevés d’efficacité des cellules. On le dépose généralement sur du plastique afin de créer une fine couche plus petite que des cheveux humains.
Les expériences récentes ont montré que ce composant permet d’atteindre des taux d’efficacité déjà quasiment similaires aux cellules silicium. Selon les prévisions de centres de recherche, les taux d’efficacité pourraient même dépasser les 30% dans les prochaines années. Cette augmentation importante du taux d’efficacité ne s’accompagne pas pour autant d’une hausse des coûts. C’est pourquoi beaucoup dans l’industrie solaire considèrent les pérovskites comme étant de véritables « game-changer » de la transition énergétique.
L’Europe veut concurrencer la Chine
En retard sur les cellules à silicium
L’European Perovskite Initiative vise à faire de l’Europe le leader mondial dans les technologies des cellules photovoltaïques à pérovskite. Les industriels européens souhaitent en effet revitaliser une industrie décimée en partie par la compétition chinoise. Aujourd’hui, l’Europe ne représente plus que 13 % de la fabrication des panneaux solaires dans le monde. Sur les cellules photovoltaïques à silicium, neuf des dix des plus grandes entreprises mondiales sont également chinoises.
L’Europe ne maîtrise plus qu’une partie de la chaîne de valeur dont notamment la fabrication de silicium polycristallin. Elle se trouve aussi en pointe sur la partie software de la production, du monitoring au contrôle des systèmes (BOS). Néanmoins, sa dépendance à la Chine sur la fabrication des cellules et des panneaux menace clairement son indépendance énergétique.
Une alliance européenne pour les pérovskites
Afin de revitaliser l’industrie solaire européenne, les européens ont décidé d’unir leurs forces pour dominer les cellules à pérovskites. Par le passé, l’atomisation du marché européen avait permis aux acteurs chinois d’utiliser leurs économies d’échelles pour écraser la concurrence. L’Europe souffre également de l’émiettement de son industrie en matière de recherche & développement face aux mastodontes chinois. En s’alliant, les industriels européens espèrent ainsi attirer davantage les investisseurs aujourd’hui encore trop frileux sur les technologies bas-carbone.
L’alliance créée en 2019 permet de contrer cette tendance à l’atomisation en favorisant des synergies entre les acteurs européens. Aujourd’hui, l’initiative compte près de 79 membres dans 19 pays dont la totalité des plus grandes entreprises européennes du secteur. Surtout, l’alliance bénéficie du soutien d’un grand nombre de centres de recherche donnant un avantage technologique aux producteurs européens. L’initiative peut ainsi se targuer du fait que 80% des membres soient des universités ou des instituts de recherche.
Une initiative indispensable
L’avance européenne sur les cellules à pérovskite
L’European Perovskite Initiative donne donc à l’Europe les moyens de s’imposer comme un leader dans la course aux technologies pérovskites. À l’heure actuelle, les industriels européens possèdent une longueur d’avance sur leurs concurrents internationaux. Ainsi, la firme anglo-allemande Oxford PV affiche des taux d’efficacité record de 27,3%. Deux autres membres de l’alliance, Imec et EPFL, ont également atteint des taux supérieurs à 25 %.
À l’inverse, aucune des entreprises non-européennes n’a atteint un tel niveau d’efficacité. Le chinois Microquanta Semiconductor annonce pour l’heure des taux d’efficacité proches de 15 % sur ses cellules à pérovskites. De même pour les compagnies japonaises telles que l’alliance Toshiba-NEDO. Pour l’Europe, la difficulté constituera néanmoins à répondre au défi de la stabilité à long-terme de ces cellules.
Une compétition de plus en plus rude
L’avantage technologique européen reste encore très fragile et beaucoup de firmes non-européennes commencent à investir sur ces technologies pérovskites. Ainsi, l’américain Swift Solar est sur le point de développer des cellules tandem de très hautes performances. De même, le sud-coréen Frontier Energy Solution atteint déjà 20% d’efficacité sur ses cellules.
Mais la concurrence la plus importante proviendra des acteurs chinois. Microquanta Semiconductor a en effet inauguré une usine de production de cellules pérovskites de 200.000 mètres2 en Chine. En 2022, c’est un autre géant chinois du secteur, GCL, qui commencera à produire 1 GW de ces cellules.
En conséquence, la compétition internationale pour les cellules à pérovskite ne fait que commencer. L’Europe, la Chine et les États-Unis se positionnent ainsi déjà sur ce secteur prometteur pour l’avenir. En unifiant leurs efforts, les industriels européens comptent sur l’European Perovskite Initiative pour s’imposer sur cette nouvelle technologie. Rappelons que les enjeux sont de taille dans un monde qui nécessitera énormément de solaire dans les années à venir.