La grève dans le secteur de l’énergie et les pénuries ou rationnements de carburant qui en découlent pèsent sur les activités et les travailleurs fortement dépendants des déplacements à bord de véhicules.
Un fardeau qui s’ajoute à la hausse des prix du carburant et de l’énergie mais dont l’impact sur l’économie française est encore difficile à mesurer.
Selon l’Insee, 74% des actifs qui se déplacent pour travailler utilisent leur voiture.
“C’est un problème de stress mais aussi un problème de coût car ça augmente la tension sur un marché qui n’en avait pas besoin et ça pèse sur le pouvoir d’achat des salariés”, souligne Fabrice Le Saché, vice-président et porte-parole du Medef.
“Panique” chez soignants et pompiers
Certains véhicules de secours (sapeurs-pompiers, police, SAMU ou gendarmerie) sont considérés comme prioritaires. Les soignants libéraux (médecins, infirmiers, aides à domicile et aux personnes âgées) réclament d’avoir eux aussi cet accès.
Des pompiers du Rhône ont demandé des mesures leur permettant d’acheter du carburant pour rejoindre leurs casernes et ainsi assurer “la continuité du service”.
Hors santé et pompiers, d’autres secteurs demandent quant à eux le déblocage de stocks stratégiques supplémentaires de l’Etat pour maintenir leur activité.
Les transports “très inquiets”
“Il y a un problème pour toutes les entreprises qui ont des flottes de véhicules”, résume Fabrice Le Saché.
Les transporteurs routiers sont “sur le fil du rasoir”, selon l’organisation professionnelle Otre. Les entreprises ont leurs propres cuves mais “ont toujours des difficultés à se faire livrer” en temps et en heure… et en quantité.
Certaines stations-service refusent aussi de servir ou restreignent l’accès aux poids lourds.
“On a des transporteurs qui ont mobilisé des salariés et un service de livraison pour faire le plein des véhicules pendant la nuit… pour espérer pouvoir repartir le lendemain matin pour les livraisons”, s’insurge François Asselin, président de la Confédération des PME, évoquant aussi des difficultés pour les services de maintenance, de dépannage et les taxis.
Les autocars longue distance FlixBus ont demandé que leur secteur bénéficie d’un accès prioritaire. Plusieurs auto-écoles ont également tiré la sonnette d’alarme, les moniteurs étant obligés de faire des heures de queue pour faire le plein.
Les grossistes sont eux “très inquiets” et anticipent “des perturbations sévères dans les livraisons” à partir de vendredi, la plupart ne disposant pas de cuves de stockage. Certaines entreprises ont avancé tôt le matin les horaires de prise de service pour trouver du carburant.
“Pas de semis” pour l’agriculture
Dans le nord de la France, les exploitants ont épuisé leurs réserves de GNR (gazole non routier) et voient leurs livraisons rationnées: pas plus de 1.000 litres dans la Marne ou en Flandres.
Plusieurs exploitations sont ou seront à l’arrêt dans les jours qui viennent, ont alerté les fédérations d’exploitants, dénonçant “une prise d’otage” à un moment critique.
“Si on ne fait pas les semis de céréales, cela aura un impact sur la disponibilité en blé en 2023 et donc sur le pain. On est en alerte, parce que les semis, c’est maintenant, pas dans dix jours ou dans un mois”, a expliqué Joël Limouzin, vice-président du syndicat agricole majoritaire FNSEA.
Nouveau coup pour le bâtiment
Des chantiers ont déjà été suspendus, rapporte François Asselin de la CPME.
“Dans le BTP, les pelleteuses et machines ont besoin de beaucoup de carburant, les endroits les plus touchés par les pénuries sont l’Ile-de-France et les Hauts de France, avec aussi des salariés qui n’arrivent pas à rejoindre leurs chantiers”, souligne le président des artisans du bâtiment (CAPEB) Jean-Christophe Repon.
Il demande au gouvernement la possibilité d’obtenir des mesures d’activité partielle par territoire comme cela avait été le cas pour le Covid-19.
Commerces et loisirs, victimes collatérales
Pour Fabrice Le Saché, il y a un impact sur “les loisirs, la restauration, les centres commerciaux et le commerce en général, les activités tertiaires…
Il y a des gens qui gèlent leur week-end et donc qui ne consomment pas et ne se déplacent pas”. “L’activité sur la semaine du 26 septembre était très bonne (…) mais elle est en recul de 6% par rapport à l’année dernière sur la semaine suivante”, notamment dans les zones périphériques où les consommateurs se rendent en voiture, ajoute Yohann Petiot, directeur général de l’Alliance pour le
commerce, qui regroupe grands magasins et enseignes de l’habillement et de la chaussure.
“La logistique des enseignes est mise sous tension et cela a pour effet de ralentir l’activité pour certains magasins (…) Pour autant, l’approvisionnement des magasins reste pleinement assuré”, a assuré la
fédération du commerce et de la distribution.