L’ambition du gouvernement fédéral canadien d’éliminer les émissions de gaz à effet de serre (GES) issues de la production d’électricité d’ici 2050 pose un défi sans précédent. Selon une étude du Fraser Institute, la croissance démographique, l’expansion économique et l’électrification des transports vont considérablement accroître la demande en électricité. Pour satisfaire ces besoins uniquement avec des sources d’énergie bas carbone, le Canada devra construire des infrastructures à une cadence et une échelle inédites.
Une équation complexe pour le mix énergétique
Les scénarios envisagés par le Fraser Institute mettent en évidence l’ampleur du défi. Pour une transition exclusivement solaire, il faudrait construire 840 centrales solaires de taille équivalente au Travers Solar Project en Alberta. Avec une durée de construction moyenne de deux ans par projet, cela représenterait 1 680 années de travaux cumulées.
Dans le cas d’une dépendance à l’éolien, le pays devrait édifier 574 parcs éoliens similaires à la Seigneurie de Beaupré au Québec, nécessitant un effort de 1 150 années de construction cumulées. Quant à l’hydroélectricité, le scénario imposerait l’édification de 134 barrages comparables au Site C en Colombie-Britannique, un projet nécessitant sept ans de travaux par installation, soit 938 années de construction au total.
Le nucléaire : une alternative rapide mais coûteuse
L’étude envisage également le nucléaire comme une option, nécessitant 16 réacteurs équivalents à ceux de la centrale Bruce en Ontario. Avec un délai de sept ans par centrale, ce scénario nécessiterait 112 années de construction cumulées. Toutefois, les coûts et les contraintes réglementaires demeurent un frein.
L’exemple du projet Site C en Colombie-Britannique illustre ces défis. Initié en 1971, il aura fallu 43 ans avant son approbation environnementale en 2014. Sa livraison prévue en 2025 affiche un budget de 16 milliards de dollars, bien au-delà des prévisions initiales.
Des obstacles réglementaires et logistiques
Les infrastructures énergétiques canadiennes sont soumises à des processus réglementaires complexes, entraînant des retards significatifs. La construction de nouveaux sites, quel que soit le mode de production choisi, sera confrontée à des défis liés à l’acceptabilité sociale, aux coûts croissants des matériaux et à la capacité du pays à mobiliser une main-d’œuvre qualifiée.
Le défi posé par les objectifs du gouvernement ne se résume donc pas uniquement à une question technologique, mais également à des contraintes économiques et administratives. Les décisions à venir devront intégrer ces réalités pour garantir un approvisionnement énergétique fiable et compétitif dans les décennies à venir.