La Commission européenne a proposé l’interdiction de toute transaction liée aux infrastructures gazières Nord Stream et Nord Stream 2, a déclaré la présidente de la Commission Ursula von der Leyen lors d’un point presse en ligne le 10 juin. Cette mesure figure dans le 18e paquet de sanctions préparé par Bruxelles pour accroître la pression économique sur la Russie après l’invasion de l’Ukraine.
La présidente de la Commission a affirmé que cette interdiction s’appliquerait à toute activité, directe ou indirecte, impliquant les gazoducs. « Pour la première fois, nous proposons une interdiction de transaction pour Nord Stream 1 et Nord Stream 2 », a-t-elle indiqué. « Aucun opérateur européen ne pourra participer à une quelconque opération liée à ces gazoducs. Il n’y aura pas de retour en arrière. »
Un dispositif destiné à bloquer tout redémarrage
Cette mesure vise à neutraliser tout scénario de reprise des livraisons de gaz russe via ces pipelines sous-marins. Le système Nord Stream 1, d’une capacité de 55 milliards de mètres cubes par an, avait commencé ses opérations commerciales en 2011 avant d’être suspendu en août 2022. Le groupe russe Gazprom avait alors invoqué l’impossibilité d’assurer la maintenance des turbines, en raison des sanctions en vigueur.
Le Nord Stream 2, dont la construction s’est achevée en septembre 2021, n’a jamais été mis en service à cause de retards réglementaires. Les deux infrastructures ont été gravement endommagées lors d’actes de sabotage en septembre 2022, rendant hors service les deux lignes de Nord Stream 1 et l’une des deux de Nord Stream 2.
Berlin soutient l’initiative de Bruxelles
L’Allemagne a exprimé son soutien à cette mesure. Le chancelier allemand Friedrich Merz a déclaré le 28 mai que son gouvernement ferait « tout ce qui est possible » pour éviter une mise en service de Nord Stream 2. Un porte-parole du gouvernement avait déjà précisé le 23 mai que Berlin soutenait les sanctions visant cette infrastructure.
Des discussions internationales sur la situation en Ukraine ont ravivé les spéculations sur une éventuelle reprise des livraisons de gaz russe, certains évoquant l’usage possible de la ligne intacte de Nord Stream 2. Le président russe Vladimir Poutine avait plusieurs fois laissé entendre que cette ligne pouvait rapidement être utilisée pour approvisionner l’Europe.
Vers une sortie programmée du gaz russe
La Commission européenne a confirmé son intention d’éliminer progressivement les importations de gaz russe. Le 6 mai, elle a présenté une feuille de route détaillant une interdiction à venir sur les achats de gaz russes via contrats à terme ou existants. Cette interdiction devrait entrer en vigueur d’ici fin 2025. Un second texte, attendu pour juillet, proposera d’étendre cette interdiction aux contrats de long terme encore actifs, avec un objectif de suppression complète d’ici fin 2027.
Toute reprise du flux via Nord Stream 2 semble toutefois irréaliste sans approbation allemande. Le ministère de l’Économie allemand a réaffirmé en mars que le projet ne disposait d’aucune certification juridique et que Berlin n’était impliqué dans aucune négociation à son sujet. Le processus de certification avait été suspendu le 22 février 2022.
Une interruption qui a fait bondir les prix
La suspension des livraisons russes a conduit à une hausse spectaculaire des prix sur les marchés européens. Les exportations via le gazoduc Yamal-Europe ont été interrompues, tandis que les flux transitant par l’Ukraine ont été réduits courant 2022. Gazprom a ensuite cessé ses livraisons via Nord Stream à la fin du mois d’août 2022, invoquant à nouveau des problèmes techniques.
Face à la baisse des volumes, les acheteurs européens ont été contraints de se tourner vers d’autres sources, faisant grimper les prix. Le 26 août 2022, Platts, filiale de S&P Global Commodity Insights, évaluait le prix à terme du hub néerlandais TTF à un niveau record de 319,98 €/MWh ($365,67/MWh). Au 9 juin, ce même prix restait relativement élevé à 35,62 €/MWh.