La Commission européenne a présenté mardi 14 mars ses propositions pour réformer le marché de l’électricité en Europe. Tout en évitant une restructuration complète du marché, la Commission entend développer les contrats énergétiques de long terme afin de protéger les consommateurs et d’encourager les investissements dans les énergies renouvelables et le nucléaire.
Les contrats de long terme pour les énergies décarbonées
Les prix de gros de l’électricité dépendent actuellement du coût de la dernière centrale utilisée pour équilibrer le réseau, principalement des centrales à gaz. Suite à la guerre en Ukraine, le marché s’est envolé l’an dernier en même temps que les cours du gaz. Plutôt que de restructurer complètement le marché en dissociant le gaz de l’électricité, la Commission propose de développer les contrats de long terme pour les énergies décarbonées. Cela permettrait aux consommateurs de lisser leur facture et offrirait des revenus prévisibles aux fournisseurs.
Faciliter le déploiement des PPA
Pour faciliter le déploiement des contrats d’achat d’électricité de gré à gré entre deux acteurs privés (PPA), la Commission souhaite que les entreprises « bénéficient de prix plus stables pour la production d’énergies renouvelables et non-fossiles ». Les États devraient établir des régimes de garanties publiques pour couvrir les risques de crédit des acheteurs, permettant ainsi à davantage d’entreprises de souscrire ces contrats. Les fournisseurs d’électricité au détail devraient également se couvrir de manière appropriée pour atténuer leur risque de surexposition à la volatilité des prix.
Les « contrats pour la différence » à prix garanti par l’État
La Commission soutient également l’usage de « contrats pour la différence » (CFD) à prix garanti par l’État. Dans ce mécanisme, les producteurs d’électricité devront reverser les recettes excédentaires aux consommateurs en cas de hausse des prix et bénéficieront d’une compensation en cas de baisse du marché. La France a fortement plaidé en faveur de l’application des CFD au secteur de l’atome civil pour financer les nouvelles infrastructures. Paris a également obtenu que les CFD soient étendus aux réinvestissements dans des centrales existantes afin de prolonger leur durée de vie ou d’augmenter leur capacité.
Des mesures pour protéger les consommateurs et durcir les sanctions
Le plan proposé par l’UE entend également renforcer la protection des consommateurs, en durcissant les sanctions pour infraction à la concurrence et manipulations de marché, tout en améliorant la protection des clients vulnérables. Ces derniers ne pourront plus être déconnectés en cas de retard de paiement, et des prix réglementés pourront être proposés par les Etats aux ménages et SMEs en cas de crise.
Flexibilité et mécanismes de capacités pour répondre aux pics de demande
Le texte propose également de renforcer la flexibilité du marché de l’énergie, en permettant aux producteurs d’électricité de cumuler les contrats pour la différence et les Power Purchase Agreements (PPA). Les producteurs pourront ainsi continuer d’être actifs sur le marché à court terme, sans que le prix volatil de ce marché ne détermine leurs revenus. Les Etats devront évaluer leurs besoins en flexibilité à horizon cinq ans, afin de mieux répondre aux pics de demande. Les mécanismes de capacités, qui rémunèrent la capacité disponible d’une centrale plutôt que sa production, pourront être généralisés. Enfin, il sera possible d’être rémunéré en échange d’une réduction de sa consommation.
Des divergences autour du rôle du nucléaire
Le rôle du nucléaire pose cependant problème : les divergences entre les États membres pourraient en effet compliquer les négociations sur ce texte. La Commission espère toutefois parvenir à un accord d’ici l’hiver.
Le plan proposé par l’EU a été salué par la France, qui a obtenu satisfaction sur plusieurs points, notamment l’extension des CFD aux réinvestissements dans des centrales existantes. D’autres pays, comme l’Allemagne, ont en revanche exprimé leur désaccord, plaidant pour des CFD facultatifs et réservés aux nouvelles infrastructures renouvelables. La proposition de l’UE constitue néanmoins une base de discussion solide pour la suite des négociations sur la transition énergétique en Europe.