La multinationale britannique BP a annoncé la suspension indéfinie du développement de son projet d’hydrogène bleu à la raffinerie de Whiting, située dans l’Indiana. Cette décision intervient alors que le projet constituait une composante centrale du plan régional de création d’un pôle d’hydrogène propre destiné à approvisionner l’industrie lourde du Midwest. Initialement prévu pour produire de l’hydrogène à partir du gaz naturel tout en captant et stockant les émissions de dioxyde de carbone (CO₂), le projet visait notamment à fournir une énergie à faible empreinte carbone aux aciéries régionales. Cette initiative s’inscrivait dans le cadre d’un partenariat public-privé ambitieux baptisé Midwest Alliance for Clean Hydrogen (MACH).
Un financement fédéral remis en question
Le projet de Whiting bénéficiait en partie d’un accord de financement fédéral de 1 milliard de dollars conclu entre le Département américain de l’énergie (Department of Energy, DOE) et le MACH. À ce jour, seuls 22 millions de dollars ont effectivement été déboursés par le gouvernement américain. L’avenir du financement, accordé sous l’administration précédente, demeure incertain alors que le DOE a déjà procédé à l’annulation de plusieurs projets énergétiques, totalisant 3,7 milliards de dollars. Le Secrétaire américain à l’énergie Chris Wright a indiqué que les engagements de financement pris par l’administration précédente restaient sous examen jusqu’à la fin de l’été, sans préciser le sort réservé spécifiquement au projet de Whiting.
Des retraits industriels successifs
Par ailleurs, cette suspension s’inscrit dans une série de désistements récents touchant le développement industriel de l’hydrogène décarboné dans le Midwest. L’entreprise sidérurgique Cleveland-Cliffs, autre acteur clé du pôle régional envisagé, a récemment annulé son projet de construction d’une usine sidérurgique fonctionnant à l’hydrogène dans l’Ohio. Ce projet bénéficiait pourtant d’un engagement de financement fédéral à hauteur de 500 millions de dollars. Ces retraits posent des questions quant à la faisabilité économique immédiate des infrastructures d’hydrogène prévues, considérées jusque-là comme essentielles à l’objectif stratégique du gouvernement américain de décarboner son industrie lourde.
Contexte industriel complexe
Le porte-parole de BP a indiqué que cette décision visait principalement à garantir la compétitivité économique de sa raffinerie, l’une des plus grandes installations de raffinage du Midwest. Le contexte global marqué par une volatilité accrue des prix du gaz naturel et des technologies de capture du carbone à coût élevé complexifie les plans initiaux d’investissement dans l’hydrogène bleu. Le marché émergent de l’hydrogène à faible émission de carbone peine en effet à trouver son équilibre financier, contraignant les entreprises à réévaluer leurs engagements face aux réalités économiques actuelles.
L’impact de cette suspension dépasse le cadre strict de BP et de Whiting, amenant les décideurs et investisseurs à réexaminer les conditions nécessaires à l’émergence d’une économie de l’hydrogène dans le Midwest américain. Les prochains mois seront déterminants pour comprendre si ce retrait annonce un repositionnement stratégique temporaire ou un signe avant-coureur d’autres désistements industriels dans la région.