Le ministère allemand de l’Économie a exprimé, lors d’une conférence de presse récente, sa volonté de réexaminer les sanctions européennes prévues en 2025 pour les constructeurs automobiles qui ne respectent pas les seuils d’émissions de dioxyde de carbone (CO2). Cette initiative fait suite à des échanges avec la France, où le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, soutient également une suspension temporaire de ces amendes pour répondre aux défis que rencontre l’industrie automobile en Europe.
Les amendes imposées par la norme européenne CAFE (Corporate Average Fuel Economy) visent à encourager les constructeurs automobiles à réduire progressivement les émissions de leurs véhicules. Un nouveau seuil d’exigence doit entrer en vigueur dès janvier 2025, imposant des contraintes supplémentaires aux constructeurs. Cependant, avec la concurrence des fabricants chinois, les coûts énergétiques croissants et une baisse de la demande mondiale, cette échéance est perçue comme un poids supplémentaire pour l’industrie automobile allemande.
M. Ferracci a souligné qu’un report des sanctions à 2026 pourrait offrir un répit aux entreprises qui ont massivement investi dans l’électrification de leurs lignes de production ces dernières années. Cette mesure permettrait, selon lui, de renforcer la compétitivité des acteurs européens face aux constructeurs chinois, dont les véhicules électriques inondent actuellement le marché européen.
Des divergences au sein du gouvernement allemand
En Allemagne, la question de l’assouplissement des sanctions environnementales divise le gouvernement. Bernhard Kluttig, secrétaire d’État allemand à l’Économie, a précisé qu’aucune décision définitive n’avait encore été prise. Bien que certains membres du gouvernement, issus notamment du Parti social-démocrate (SPD) et des Verts, soient favorables à une approche plus flexible, d’autres, notamment les libéraux représentés par Christian Lindner, ministre des Finances, plaident pour des mesures plus radicales. M. Lindner souhaite non seulement la suppression des amendes, mais également une réévaluation de l’interdiction de vente des voitures thermiques neuves en 2035 dans l’Union européenne.
L’impact économique de la transition vers l’électrification est un sujet de préoccupation majeur pour l’Allemagne, où près de 140 000 emplois dans le secteur automobile pourraient disparaître d’ici 2035, d’après une étude de la fédération des constructeurs allemands VDA. Cette inquiétude est partagée par les acteurs du secteur au niveau européen : les équipementiers automobiles européens ont annoncé la suppression de 32 000 emplois au premier semestre 2024, soit un nombre de licenciements supérieur à celui enregistré pendant la pandémie de Covid-19.
Vers une décision européenne au premier semestre 2025
En réponse aux demandes de Berlin et de Paris, la décision finale devrait revenir à la Commission européenne, dont les nouveaux commissaires entreront en fonction en décembre prochain. L’objectif est de concilier la poursuite de la décarbonation de l’industrie automobile avec le maintien de la compétitivité des entreprises européennes.
M. Ferracci a également annoncé la préparation d’un « paquet législatif » au premier semestre 2025, destiné à soutenir à la fois la demande et les fabricants de véhicules en Europe. La France et l’Allemagne s’unissent ainsi pour renforcer les capacités de l’industrie automobile européenne face aux défis environnementaux et économiques, en mettant en avant une solution temporaire de soutien aux entreprises qui s’engagent dans la transition énergétique.