Le Premier ministre François Bayrou a annoncé lundi son intention de publier le décret fixant la feuille de route énergétique de la France d’ici à la fin de l’été, après l’examen d’une proposition de loi au Parlement. Cette décision intervient dans un contexte de fortes tensions politiques autour du projet, alors que le gouvernement tente de ménager les oppositions.
Un compromis face aux menaces de censure
La Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), en préparation depuis plusieurs années, doit établir les objectifs énergétiques du pays pour 2025-2035, en vue d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Initialement prévue pour être actée par décret après un simple débat sans vote, sa publication est désormais conditionnée à l’examen d’une proposition de loi portée par le sénateur Les Républicains (LR) Daniel Gremillet, inscrit à l’ordre du jour parlementaire à partir du 16 juin selon le gouvernement.
Face aux critiques du Rassemblement national (RN) et de certains parlementaires de droite et du centre, l’exécutif a concédé ce changement. Jean-Philippe Tanguy, député du RN, a salué une « grande victoire politique », affirmant que sans l’intervention de Marine Le Pen, le décret aurait été adopté « dans le dos du Parlement ».
Relance du nucléaire et soutien « raisonné » aux renouvelables
Le nouveau projet de PPE acte la relance de la filière nucléaire avec la construction de six nouveaux réacteurs EPR2. Parallèlement, il confirme le développement de l’éolien en mer et ambitionne de réduire la part des énergies fossiles dans la consommation énergétique, de 60% en 2023 à 42% en 2030 puis 30% en 2035. François Bayrou a défendu un « mix électrique » associant « une orientation de base pro-nucléaire » à un « soutien raisonné aux énergies renouvelables ».
Pour appuyer cette démarche, un groupe de travail dirigé par le député Renaissance Antoine Armand et Daniel Gremillet mènera des auditions et des études complémentaires, dont les conclusions sont attendues pour la fin du mois de mai.
Des critiques persistantes à gauche comme à droite
Une partie de la gauche, représentée par Aurélie Trouvé de La France insoumise (LFI), a dénoncé « un programme effréné » de construction nucléaire, soulignant l’absence d’une structuration solide de la filière renouvelable. Dominique Voynet, figure écologiste, a critiqué le choix du nucléaire en affirmant qu’il aggraverait le retard énergétique du pays.
À droite, Jérôme Nury (LR) a de son côté fustigé l’essor des énergies renouvelables, qualifiées de « gouffre financier » et responsables de la dégradation des paysages. Face à ces critiques opposées, la députée Olga Givernet (Renaissance) a ironisé en évoquant que « peut-être que la PPE est équilibrée ». Un nouveau débat sur la souveraineté énergétique est programmé au Sénat le 6 mai.