Une nouvelle dispute a éclaté entre la France, l’Allemagne et l’Espagne au sujet de l’énergie nucléaire. Paris est furieux du manque de soutien de Berlin et de Madrid à ses efforts pour que l’hydrogène dérivé du nucléaire soit qualifié de « vert » dans la législation européenne. Le différend retarde le processus de mise en œuvre des nouvelles directives européennes sur les énergies renouvelables et menace d’entrer en conflit ouvert à un sommet important jeudi.
La position française
La France a basé sa campagne sur son parc nucléaire vieillissant afin de produire plus d’hydrogène qui viendrait se substituer aux sources polluantes non renouvelables. L’objectif français est que cette production soit reconnue comme « propre » et comptabilisée dans les objectifs au seins des directives européennes concernant les énergies renouvelables.
La ministre Française de l’Énergie, Agnès Pannier-Runacher, a exprimé sa profonde frustration face au comportement tenu par certains pays membres face à cette initiative : « Ces négociations ne prennent pas une bonne tournure ». Elle ajoute : « Il serait incompréhensible que L’Espagne et L’Allemagne adoptent des positions différentes à Bruxelles et ne tiennent pas leurs engagements ».
Une alliance Franco-espagnole ?
En Octobre 2020, le président français Emmanuel Macron a validé un projet d’accord portant sur un projet industriel dédié à la production massive d’hydrogène (H2Med ou BarMar). Ce projet devant mener à la création d’un pipeline connectant Barcelona et Marseille entraînant donc une alliance Franco-espagnole est officiellement décrété depuis Janvier 2021. L’Allemagne vient joncher ce consortium après avoir assisté à une réunion organisée par Paris il y a quelques jours. Le but pour elle est simple : pouvoir importer massivement cet hydrogène espagnol pour pallier le marchandage gazier russe dont elle fait souvent les frais.
Une divergence dans les discours
Malgré cette union Franco-espagnol-allemande, voilà quelques semaines qu’une vive controverse fait rage autour du caractère « propre » dont peut revêtir cet hydrogène produit grâce aux sources nucléaires françaises (hydrogène rouge). Lors du sommet barcelonais, certains engagements on était pris mentionnant que ce type particulier d’hydrogène pourrait être classifié comme vert si des conditions très strictes étaient respectées. De leurs côtés ni Berlin ni Madrid ne reconnaissent une telle promesse affirmant même qu’aussi bien le nucléaire que ce type particulier d’hydrogène ne pouvaient être considérés comme « propres » ou « verts ». En effet , un haut responsable politique espagnol aura même beaucoup plus incisif affirmant: « cela (« l’hydrogène Rouge ») ne peut pas être renouvelable car le nucléaire n’est pas une source ‘propre’. C’est impossible ! »
Les grands enjeux concernant BarMar
Le pipeline BarMar est un projet européen de grande envergure visant à faciliter la circulation d’hydrogène (rouge) entre la France et l’Espagne. L’hydrogène rouge est essentiel aux objectifs européens visant à décarboniser l’industrie lourde et à aider l’UE à atteindre ses objectifs climatiques.
Au moment où la Commission européenne prévoit d’investir jusqu’à 300 milliards d’euros pour proposer un hydrogène vert ou à faible teneur en carbone, certains pays membres de l’UE craignent que le conflit actuel ne s’étende même au-delà du pétrole et du gaz. Cela pourrait retarder les lois nécessaires afin que ces objectifs puissent être atteints.
Les nouvelles réglementations sur le marché du gaz cherchent toutefois intégrer plus d’hydrogène à ce réseau, ainsi qu’une «banque de l’hydrogène» pour financer de nouveaux projets. Toutefois, la France souhaite que son hydrogène rouge soit inclus dans cette banque ; or, il doit avant tout être considérés comme renouvelable.
Cependant, alors que la Commission européenne recherche une définition commune sur ce qui constitue un hydrogène «renouvelable», le Parlement européen a reporté les négociations concernant la directive RED-3.
La position française face au blocage du «BarMar»
La menace française est clairement visible : elle serait disposée à donner son feu vert au pipeline BarMar si elle est autorisée à envoyer son hydrogène rouge vers l’Ibère via ce conduit. Sans l’approbation française, il ne peut pas y avoir de pipeline BarMar – ce qui met le gouvernement français dans une position forte face aux autres pays membres de l’UE. Le différend repose donc principalement sur une question politique : devrait on considérés l’hydrogène rouge comme renouvelable ?