Au moins 130 millions de personnes au Bangladesh, soit plus de 80% de la population, ont été privées d’électricité mardi après une panne géante aux causes inconnues, dans le contexte mondial de crise de
l’énergie.
Le Bangladesh, qui dépend grandement des importations de gaz pour produire son électricité, souffre depuis plusieurs mois de la hausse des cours mondiaux, consécutive à l’invasion de l’Ukraine par la Russie.
A la tombée de la nuit, les rues habituellement éclairées du centre de Dacca, mégalopole de plus de 22 millions d’habitants, sont restées dans le noir. Et sur les marchés, les vendeurs de légumes s’éclairaient à la bougie, a constaté l’AFP.
Mais “à 21H00 (15H00 GMT), le courant a été rétabli”, et ce “dans tout le pays”, a assuré à l’AFP A.B.M Badruddoza, porte-parole de la société nationale du réseau électrique.
Mais la compagnie d’électricité nationale n’avait toujours pas d’explication à la panne dans la soirée. “L’enquête est toujours en cours”, a ajouté Shamim Ahsan, porte-parole du Conseil de développement de l’énergie, évoquant la piste de la défaillance technique.
Cette panne géante, qui a duré de 14H00 à 21H00, a touché l’ensemble du réseau, à l’exception de certaines parties du nord-ouest du Bangladesh.
Ce pays pauvre, qui compte de nombreuses usines fournissant des vêtements pour les marques occidentales, peine depuis des semaines à financer l’importation de diesel et de gaz en quantité suffisante pour répondre à la demande en électricité.
– Infrastructures médiocres –
Dacca a dû instaurer des “mesures d’austérité”. Et les centrales diesel du pays produisant de l’électricité, d’une capacité de production de 1.500 mégawatts. Et certaines centrales à gaz ont été mises à l’arrêt.
Les centrales électriques du Bangladesh “dépendent fortement du gaz naturel”, souligne sur son site le ministère américain du Commerce, dans une note sur le Bangladesh de juillet 2022.
Cependant, “la capacité de production d’électricité a considérablement augmenté au cours de la dernière décennie, malgré la médiocrité des infrastructures de transmission et de distribution, l’efficacité thermique inadéquate”, analyse Washington.
Le gouvernement du Bangladesh avait imposé en juillet de longues coupures de courant pour conserver les stocks existants, avec des pannes pouvant durer jusqu’à 13 heures par jour. Mais les coupures n’avaient jusqu’ici jamais pris de telles proportions.
Des dizaines de milliers de mosquées du pays avaient été sommées de ne faire fonctionner les climatiseurs que pendant les cinq prières quotidiennes, afin de soulager la pression sur le réseau électrique.
Le gouvernement avait également ordonné des coupures de courant programmées, allant jusqu’à deux heures par jour, et la fermeture des magasins après 20 heures.
Il avait aussi appelé la population à économiser l’énergie et évoqué la possibilité pour les officiels d’avoir recours au covoiturage, de raccourcir les heures de bureau et de tenir des réunions en ligne.
Les pénuries ont été aggravées par la dépréciation de la monnaie locale, le taka – d’environ 20% par rapport au dollar, selon les économistes – et la diminution des réserves de change.
La colère de la population s’est intensifiée à la suite des précédentes coupures de courant.
Au moins trois manifestants ont été tués par les forces de l’ordre au cours de grands rassemblements à Dacca contre l’augmentation du coût de la vie.
Une centaine de personnes ont été blessées lors d’une manifestation violemment réprimée par la police, selon le parti d’opposition Bangladesh Nationalist Party.
L’inflation des prix à la consommation a en outre durement touché les budgets des ménages et le gouvernement s’est récemment engagé à plafonner le prix de plusieurs aliments de base, dont le riz, afin d’apaiser le mécontentement de la population.
Le Bangladesh avait déjà connu une panne de courant de grande ampleur en novembre 2014. Environ 70% du pays avaient alors été privés d’électricité pendant près de dix heures.