L’Allemagne et l’Union européenne connaissent une croissance rapide de leurs capacités solaires et éoliennes. Cette transition, largement accélérée par la diminution des exportations d’énergie russe depuis le début du conflit en Ukraine, entraîne toutefois une pression considérable sur les réseaux électriques européens. Les périodes de forte production, liées aux conditions météorologiques, ne correspondent pas toujours à la demande, entraînant ainsi des déséquilibres importants. Ces fluctuations conduisent à des prix négatifs sur les marchés de l’électricité, rendant la gestion du réseau complexe et coûteuse.
Selon Ember, un think tank spécialisé dans l’énergie, l’absence d’infrastructures de stockage suffisantes freine l’optimisation des énergies renouvelables. En effet, la capacité actuelle de stockage, que ce soit en Allemagne ou au sein de l’UE, est nettement insuffisante pour absorber les excédents de production lors des pics solaires ou éoliens, ainsi que pour répondre aux périodes de baisse de production. Cette situation conduit inévitablement à un recours accru aux combustibles fossiles, malgré l’essor des énergies décarbonées.
Un manque d’investissement dans les infrastructures de stockage
L’Allemagne, qui dispose actuellement de 1,8 GW de batteries connectées au réseau, prévoit d’ajouter 3,7 GW supplémentaires au cours des trois prochaines années. Cependant, ces investissements, bien qu’encourageants, restent insuffisants pour compenser les fluctuations de l’offre et de la demande d’électricité verte. Les analyses d’Ember montrent que si le pays avait disposé de 2 GW supplémentaires de capacités de stockage en juin 2024, il aurait pu éviter l’importation de 2,5 millions d’euros de gaz naturel. Ces chiffres mettent en lumière l’ampleur des économies potentielles liées à une meilleure gestion des excédents d’énergie renouvelable.
Malgré ces projets d’expansion, Beatrice Petrovich, analyste senior chez Ember, souligne que l’Union européenne n’a pas mis en place de stratégies aussi ambitieuses pour le stockage d’énergie qu’elle l’a fait pour les énergies renouvelables. Cette absence de vision à l’échelle européenne expose le continent à des risques de déséquilibre énergétique et à une dépendance prolongée aux combustibles fossiles, en dépit des progrès réalisés en matière de production d’énergie verte.
Des opportunités économiques non exploitées
Le développement des infrastructures de stockage d’énergie représente non seulement une nécessité pour stabiliser les réseaux électriques, mais aussi une opportunité économique. En effet, les batteries peuvent permettre des opérations d’arbitrage sur les marchés de l’électricité, en stockant l’énergie lorsque les prix sont bas et en la revendant lorsque les prix augmentent. Cette stratégie pourrait offrir des rendements intéressants pour les investisseurs, tout en réduisant la dépendance aux sources d’énergie fossile.
Cependant, les investissements restent limités. Les coûts initiaux élevés des infrastructures de stockage, combinés à une réglementation encore floue au niveau européen, freinent l’adoption à grande échelle de ces technologies. Les politiques actuelles de subventions pour la production d’énergie verte, sans stratégie équivalente pour le stockage, créent des goulets d’étranglement dans la gestion des flux d’énergie, notamment lors des périodes de forte production solaire ou éolienne.
Une dépendance aux combustibles fossiles persistante
La situation actuelle met en lumière l’urgence d’un plan d’investissement européen coordonné pour le stockage d’énergie. Si les gouvernements européens souhaitent atteindre leurs objectifs de décarbonation, ils doivent non seulement accélérer la transition vers les énergies renouvelables, mais aussi investir massivement dans les technologies de stockage pour garantir la stabilité du réseau. Le maintien de l’équilibre entre l’offre et la demande est essentiel pour éviter les recours constants aux centrales à gaz ou à charbon en période de faible production renouvelable.
En Allemagne, la participation active du Parti des Verts au sein du gouvernement a permis de renforcer les ambitions du pays en matière d’énergies renouvelables. Toutefois, cette volonté politique doit être suivie par des actions concrètes à plus grande échelle au niveau européen, afin d’éviter une fragmentation des stratégies énergétiques entre États membres.