Depuis plusieurs décennies, l’Iran, membre fondateur de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP), est confronté à une érosion progressive de son influence sur le marché mondial du pétrole. Cette diminution résulte principalement de la pression des sanctions américaines, d’une baisse continue de sa production et d’une forte dépendance à l’égard de la Chine pour écouler son brut.
Sanctions américaines et conséquences économiques
Les sanctions américaines imposées dans le cadre de la politique dite de « pression maximale » initiée en 2018 ont drastiquement limité la capacité de l’Iran à exporter son pétrole. À son apogée, avant la révolution de 1979, le pays produisait plus de six millions de barils par jour (b/j). Aujourd’hui, cette production se limite à environ 3,24 millions b/j selon les dernières données disponibles. Ce volume, bien qu’en augmentation par rapport à 2020 où il n’était que de 1,95 million b/j, reste significativement inférieur aux niveaux historiques.
Par ailleurs, le pays se trouve aujourd’hui exempt de quotas dans le cadre de l’OPEP en raison de ces mêmes sanctions, limitant ainsi son influence dans les décisions stratégiques prises par l’organisation dominée par l’Arabie saoudite. Historiquement puissant au sein du cartel pétrolier, l’Iran voit désormais ses appels à des mesures telles que des embargos ou des blocages pétroliers ignorés par les autres membres de l’alliance OPEP+.
Dépendance accrue envers la Chine
La Chine est actuellement l’unique débouché significatif du pétrole iranien, absorbant la quasi-totalité de ses exportations. En mai dernier, les exportations iraniennes se sont élevées à 1,6 million b/j, principalement à destination de la Chine via des routes indirectes comme Singapour. Ce chiffre reste inférieur aux 2,6 millions b/j exportés en moyenne en 2017, période durant laquelle l’Iran fournissait encore des raffineries en Inde, en Corée du Sud, en Turquie et en Europe.
Cette dépendance à un unique partenaire commercial rend l’économie iranienne vulnérable, notamment à des fluctuations de la demande chinoise ou à d’éventuels différends diplomatiques entre Pékin et Téhéran. De plus, la logistique d’exportation actuelle repose en grande partie sur des navires anciens, composant une flotte de transport dite « fantôme », augmentant encore la fragilité du système d’exportation iranien.
Instabilité politique et impact militaire
Les récents bombardements israéliens ont ciblé directement plusieurs installations énergétiques majeures du pays, dont le gisement gazier de South Pars et des dépôts pétroliers près de Téhéran. Même si le terminal d’exportation de Kharg, clé dans le dispositif iranien puisqu’il traite 90 % des exportations pétrolières, reste opérationnel, l’impact de ces attaques suscite déjà des inquiétudes quant aux pénuries potentielles de carburant sur le marché domestique.
La détérioration du contexte sécuritaire pèse lourdement sur l’économie iranienne, déjà affaiblie par une inflation galopante et un chômage élevé. Face à cette situation, les revenus issus du pétrole demeurent une source vitale pour le maintien de l’économie nationale.
Capacité d’action internationale restreinte
Malgré ces difficultés, l’Iran garde une capacité d’influence indirecte via ses alliés régionaux tels que le Hezbollah libanais ou le Hamas palestinien. La menace d’un blocage du détroit d’Hormuz, par lequel transitent quotidiennement environ 20 millions b/j, demeure une éventualité redoutée par le marché mondial. Toutefois, cette mesure extrême pourrait aussi isoler davantage Téhéran sur le plan diplomatique régional.
En dépit de ces cartes encore détenues, le recul significatif de son rôle dans le secteur pétrolier mondial restreint sensiblement la marge de manœuvre diplomatique et économique de l’Iran. La diminution continue de sa production, conjuguée à une dépendance commerciale exacerbée, place le pays dans une position particulièrement vulnérable face aux évolutions du marché global.