La Norvège a officiellement attribué deux zones du projet Utsira Nord aux deux consortiums candidats, Equinor–Vårgrønn et EDF–Deep Wind Offshore. Cette décision marque une étape administrative majeure dans le développement de l’éolien flottant norvégien, avec une mise en service visée à partir de 2034. Elle constitue un droit à poursuivre les études techniques et environnementales, sans garantir à ce stade un soutien financier public.
Une concurrence repoussée à la phase de subvention
L’allocation actuelle fonctionne comme une pré-qualification, permettant aux deux groupes de réaliser des études d’impact environnemental et de déposer une demande de licence. Ce n’est qu’à l’issue de cette étape que l’État norvégien organisera une enchère où le projet demandant le plus faible soutien sera retenu. Le mécanisme s’écarte d’un contrat pour différence traditionnel au profit d’une logique d’enchère inversée sur le montant d’aide publique.
La procédure est encadrée par la législation nationale sur l’énergie offshore, avec une évaluation structurée par la Direction des ressources en eau et de l’énergie (NVE) pour la soutenabilité, et Enova pour l’analyse technico-économique. L’Autorité de surveillance de l’Association européenne de libre-échange (ESA) a validé le cadre d’aides d’État appliqué à Utsira Nord dans le cadre de l’Espace économique européen (EEE).
Banquabilité et maîtrise des risques au cœur du processus
Les projets doivent démontrer une maturité avancée avec des estimations probabilistes des coûts et de la production, ainsi qu’une trajectoire crédible de réduction de coûts entre 2034 et 2040. Des exigences sont également posées sur la stratégie de couverture des risques liés à l’approvisionnement et aux matières premières. La soutenabilité, incluant les critères de recyclabilité et d’empreinte carbone, est intégrée à la notation.
Le plafond de soutien public fixé à NOK35bn ($3.22bn), indexé sur la valeur de 2025, limite la marge de manœuvre budgétaire et pousse les acteurs à optimiser dès la phase amont. La structure de l’appel d’offres, basée sur le réalisme et la réduction des incertitudes plus que sur le volume de production, oriente les projets vers une logique de finançabilité plutôt que de rendement maximal.
Un signal fort pour la chaîne industrielle et le réseau électrique
Les exigences contractuelles sur les fournisseurs, la logistique portuaire et l’installation poussent les consortiums à verrouiller en amont leurs chaînes d’approvisionnement. Cela crée des effets immédiats sur le marché des services offshore, bien avant la décision finale d’investissement. Les opérateurs doivent sécuriser leurs marges à travers des modèles EPC (engineering, procurement, construction) intégrés et des couvertures d’assurance renforcées.
Par ailleurs, le raccordement au réseau dans le sud-ouest du pays représente une contrainte structurelle forte. L’opérateur de réseau Statnett a identifié une pression croissante sur les capacités de transport, en lien avec une hausse attendue de la consommation de 40 à 120 TWh à long terme. Le projet Utsira Nord devient ainsi un levier de production additionnelle stratégique.
Les consortiums en position et les arbitrages à venir
Le consortium mené par Equinor, en partenariat avec Vårgrønn – joint-venture entre Eni Plenitude et HitecVision – consolide sa présence dans le segment offshore flottant national. EDF, via sa participation dans le véhicule norvégien Harald Hårfagre AS, obtient une première position sur le plateau norvégien mais devra s’adapter à un cadre réglementaire très structuré.
Les prochains jalons incluent la soumission des demandes de licence, la définition du contrat d’aide d’État et le choix technologique pour les flotteurs. Un échec de l’un des consortiums à franchir ces étapes pourrait faire échouer le processus concurrentiel de subvention prévu par le gouvernement norvégien.