ExxonMobil a confirmé la fermeture définitive de son vapocraqueur à éthylène le plus ancien, situé sur Jurong Island à Singapour. Cette unité, opérationnelle depuis le début des années 2000, affichait une capacité annuelle proche de 900 000 tonnes. Le groupe choisit ainsi de réorienter ses investissements vers des installations plus compétitives, notamment son nouveau complexe pétrochimique de Huizhou en Chine, doté d’un vapocraqueur flexible d’une capacité de 1,6 million de tonnes par an.
Réduction de la demande de naphta à Singapour
La fermeture entraîne une baisse attendue de la consommation locale de naphta comprise entre 1,4 et 1,6 million de tonnes par an, impactant directement les flux importés dans le hub pétrochimique de Jurong. ExxonMobil conserve néanmoins son second vapocraqueur mis en service en 2013, plus intégré aux unités aval. La raffinerie attenante, récemment modernisée pour atteindre une capacité de 592 000 barils par jour, reste également opérationnelle, confirmant un repositionnement stratégique plutôt qu’un retrait complet du site.
Contexte de surcapacité et arbitrage économique
La fermeture intervient dans un cycle bas pour le marché asiatique des oléfines, marqué par une surcapacité croissante, en particulier en Chine. Les capacités d’éthylène et de propylène y dépassent nettement la consommation locale, comprimant les marges des producteurs historiques. Selon plusieurs analystes, jusqu’à 8 millions de tonnes de capacités seraient en sursis en Asie du Sud et du Sud-Est, ciblant principalement les unités anciennes fonctionnant au naphta.
Investissement réorienté vers la Chine
Avec son complexe de Huizhou, ExxonMobil renforce son ancrage industriel en Chine continentale. Le site, entièrement détenu par le groupe, intègre une chaîne de valeur complète allant du vapocraquage aux polyoléfines de performance. Cette configuration permet au groupe de capter la demande locale tout en optimisant les coûts par rapport à des actifs plus anciens exposés à des contraintes réglementaires plus strictes.
Effets sur la chaîne d’approvisionnement régionale
L’arrêt de cette unité devrait avoir un effet limité sur les prix spot en Asie du Sud-Est, mais nécessitera une réorganisation contractuelle pour les clients transformateurs. Ceux-ci devront se tourner vers d’autres fournisseurs locaux comme Petrochemical Corporation of Singapore (PCS) ou le nouveau complexe Bukom/Jurong, repris par Chandra Asri et Glencore. Par ailleurs, le naphta libéré pourrait être réaffecté à d’autres hubs régionaux ou redirigé vers des usages carburants.
Réduction de l’exposition à la fiscalité carbone
Le vapocraqueur fermé figurait parmi les unités les plus intensives en énergie du complexe de Jurong, le rendant particulièrement vulnérable à la hausse programmée de la taxe carbone à Singapour, actuellement à 25 SGD/t et prévue à 45 SGD/t d’ici 2026. Cette fermeture permet donc à ExxonMobil de réduire son exposition future aux coûts réglementaires liés au carbone tout en conservant sa présence industrielle dans le pays.
Conséquences sociales et repositionnement stratégique
La fermeture s’inscrit dans un plan global de restructuration du groupe à Singapour, avec une réduction annoncée de 10 à 15 % des effectifs d’ici 2027. Elle intervient également après la cession du réseau de stations-service d’ExxonMobil dans le pays, alimentant les spéculations sur un repositionnement du groupe vers des segments à plus forte valeur ajoutée. Les autorités locales devront accompagner cette transition sur le plan industriel et réglementaire.
Concentration des actifs en Chine et dépendances accrues
Le recentrage des investissements sur le complexe chinois accroît la dépendance d’ExxonMobil aux conditions économiques et politiques de ce marché. En retour, le groupe bénéficie d’un meilleur accès aux marchés de consommation et d’une réduction des coûts unitaires. Cette stratégie permet aussi d’optimiser l’allocation du capital sur des installations intégrées, plus flexibles et mieux alignées sur la croissance régionale.