Le groupe Amber Energy, véhicule d’investissement affilié à Elliott Investment Management, a remporté l’enchère judiciaire des actions de PDV Holding Inc., entité mère de Citgo Petroleum Corporation, pour un montant de 5,9 Mds $. Cette cession, autorisée par un juge fédéral du Delaware, représente l’issue d’un contentieux de plusieurs années entre le Venezuela et une coalition de créanciers, mais demeure conditionnée à une licence finale de l’Office of Foreign Assets Control (OFAC) du département du Trésor américain.
Une structure juridique pensée pour contourner la souveraineté vénézuélienne
PDV Holding est une société américaine intermédiaire entre Petróleos de Venezuela S.A. (PDVSA) et Citgo. Ce schéma permet à la justice américaine de cibler un actif stratégique sans violer la doctrine de l’immunité souveraine. Le tribunal a considéré PDV Holding comme « alter ego » de l’État vénézuélien, rendant ses actions saisissables pour satisfaire les créances issues de sentences arbitrales internationales.
Un actif stratégique vendu bien en-deçà de sa valorisation historique
Citgo, qui exploite trois raffineries totalisant environ 829 000 barils par jour, 43 terminaux et 4 000 stations-service aux États-Unis, a été valorisé jusqu’à 40 Mds $ en 2023 selon ses propres estimations. La transaction actuelle implique donc une forte décote, justifiée par le contexte juridique incertain, le risque de recours et l’effet des sanctions américaines en vigueur depuis 2019.
Créanciers multiples, opposition affaiblie et perte de levier pour Caracas
Parmi les créanciers bénéficiaires figurent Crystallex, ConocoPhillips, Koch Industries, Rusoro et d’autres sociétés détentrices de sentences arbitrales, pour un montant cumulé supérieur à 20 Mds $. Ni le gouvernement vénézuélien ni PDVSA ne recevront de produit de cette cession, accentuant la fracture avec l’opposition, qui contrôlait Citgo depuis 2019 et qui se retrouve désormais sans accès aux revenus ni à l’actif.
Un enjeu géopolitique à haute intensité dans un climat de tensions régionales
Cette opération judiciaire intervient alors que les États-Unis intensifient leur présence militaire dans la mer des Caraïbes, officiellement dans le cadre d’opérations anti-narcotiques. Caracas interprète la conjonction des sanctions, des pressions militaires et de la cession judiciaire comme une stratégie coordonnée pour l’isoler économiquement et affaiblir les leviers de financement de l’État.
L’OFAC détient la clé du closing et pourrait en conditionner l’issue
Même si la justice a validé la vente, la finalisation dépend d’une licence spécifique de l’OFAC. Le Trésor américain peut donc encore retarder, modifier ou bloquer la transaction selon des critères politiques, notamment en lien avec les élections vénézuéliennes ou des négociations sur les prisonniers politiques. Ce contrôle offre à Washington un levier pour lier économie et diplomatie sans renoncer au respect des décisions arbitrales.
Amber Energy prépare une restructuration industrielle de Citgo
Le nouveau propriétaire prévoit de conserver les infrastructures de Citgo, d’en optimiser les opérations et d’investir de manière ciblée. À court terme, les flux de brut devraient rester stables, l’entreprise s’approvisionnant déjà en pétrole américain et latino-américain. Libérée de toute dépendance politique à PDVSA, Citgo pourrait adopter une stratégie orientée uniquement vers la rentabilité.