Le projet de loi de finances pour 2026 a ravivé les débats autour des biocarburants de première génération en France. La tentative du gouvernement de supprimer les avantages fiscaux accordés au biodiesel B100 et au superéthanol E85 a été écartée par l’Assemblée nationale et le Sénat, maintenant un dispositif soutenu depuis plusieurs années par la fiscalité incitative.
Des carburants issus de cultures alimentaires
Le B100 est un carburant composé à 100% de biodiesel, produit par transestérification d’huiles végétales, dont l’huile de colza constitue 77% de la matière première utilisée en France. En 2024, environ 20 000 poids lourds circulaient au B100, consommant 360 000 m³ sur l’année.
L’E85 est un carburant contenant entre 65 et 85% d’éthanol selon la saison. Issu de la fermentation de betterave, de maïs ou de blé, il est ensuite mélangé à de l’essence. Ces deux carburants appartiennent à la catégorie des biocarburants de première génération, dont la production repose sur des cultures destinées initialement à l’alimentation.
Une filière concentrée et agricole
La France est le premier producteur européen de bioéthanol et le deuxième pour le biodiesel. Le groupe Saipol, filiale du groupe Avril, détient 70% du marché du biodiesel. Pour le bioéthanol, Cristal Union, Tereos et Vestex Bioénergie assurent 80% de la production nationale.
Environ 3% de la surface agricole utile du pays est dédiée à la culture destinée aux biocarburants, représentant près d’un million d’hectares. Selon les données du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), entre 20 et 30 hectares sont nécessaires pour alimenter un seul poids lourd au B100.
Des bénéfices environnementaux remis en question
Les performances environnementales de ces carburants sont contestées. Une analyse de 2010 commandée par le ministère de l’Écologie estimait des réductions d’émissions de gaz à effet de serre de 50 à 70% par rapport au diesel fossile.
Cependant, la note du SGPE indique que le B100 n’apporte « aucun gain d’émission en termes de polluants de l’air ». En 2023, la Cour des comptes européenne a précisé que les réductions de gaz à effet de serre sont souvent surestimées, notamment en raison des changements indirects d’affectation des sols (CIAS), c’est-à-dire la conversion de zones naturelles ou forestières en terres cultivées.
Pression réglementaire et alternatives en développement
Pour limiter ces effets, l’Union européenne a plafonné en 2015 à 7% la part des biocarburants de première génération dans la consommation énergétique. Elle encourage désormais les biocarburants de deuxième génération, produits à partir de résidus agricoles ou de déchets, permettant des réductions d’émissions estimées entre 80 et 90% selon l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (IFPEN).
En France, ils représentaient 22% des biodiesels et 31% des bioessences consommés en 2024. Leur production reste néanmoins insuffisante pour couvrir les besoins. Une filière dite de troisième génération, fondée sur l’exploitation de micro-organismes, est également en cours de développement, sans perspective de substitution à court terme.