La raffinerie de Pancevo, unique site de traitement de pétrole brut en Serbie, fait face à une possible suspension de ses opérations après l’épuisement annoncé de ses réserves. Cette installation, exploitée par Naftna Industrija Srbije (NIS), couvre à elle seule environ 80 % des besoins en carburant du pays. Depuis le début octobre, elle est directement impactée par les sanctions américaines imposées à ses actionnaires majoritairement russes.
La structure actionnariale de NIS reste dominée par des intérêts russes, dont 45 % sont détenus par Gazprom Neft et 11,3 % par la société moscovite Intelligence. Ces entités, visées par les restrictions financières américaines contre le secteur énergétique russe, bloquent les flux commerciaux nécessaires à l’approvisionnement du site. Malgré les efforts de Belgrade pour obtenir une dérogation temporaire, aucune réponse officielle n’a été communiquée par les autorités américaines à ce jour.
Les capacités d’importation ne suffisent pas à compenser
Le ministère de l’Énergie avait indiqué fin octobre que les réserves de brut permettraient de tenir jusqu’au 25 novembre. En anticipation, le gouvernement a mis en place des contrats d’importation d’essence et de diesel pour éviter une pénurie immédiate. Toutefois, selon Goran Radosavljevic, économiste basé à Belgrade, ces mesures ne représentent qu’un sursis limité. “Vous pouvez prolonger l’agonie pendant quelques mois grâce à des importations supplémentaires, mais NIS fera faillite si elle ne peut plus fonctionner”, a-t-il déclaré.
Selon les estimations locales, la production nationale représentait environ 80 % de la consommation, le reste étant importé. Cette dépendance à la raffinerie rend le pays particulièrement vulnérable dans un contexte où les approvisionnements sont perturbés par les restrictions internationales.
Des négociations au point mort avec Washington
Le gouvernement serbe a plaidé pour une cession des parts russes, en proposant une acquisition à un prix supérieur à la valeur de marché si les négociations échouaient. L’État serbe détient encore près de 30 % du capital de NIS, tandis que le reste est réparti entre des actionnaires privés. En 2008, une participation majoritaire avait été vendue à Gazprom et Gazprom Neft pour 400 millions d’euros.
Dans un communiqué publié à l’issue d’une réunion gouvernementale consacrée à la situation énergétique, les autorités ont assuré qu’“il y a une quantité suffisante de produits pétroliers”, sans préciser les volumes ni les modalités logistiques d’approvisionnement. Cette déclaration vise à contenir les inquiétudes internes face au risque d’une pénurie.
La stratégie énergétique de la Serbie sous tension
Parallèlement aux discussions autour de la raffinerie, des négociations sont également en cours concernant les livraisons de gaz naturel. Moscou assure près de 90 % des besoins annuels de la Serbie en gaz, rendant tout désengagement complexe. Belgrade, qui ambitionne une adhésion à l’Union européenne tout en maintenant ses liens énergétiques avec la Russie, doit désormais manœuvrer dans un environnement diplomatique particulièrement contraint.
Le gouvernement a exclu pour l’instant toute saisie d’actifs russes sur son territoire, s’efforçant de conserver un équilibre entre ses engagements européens et ses intérêts énergétiques stratégiques.