Le producteur russe de gaz naturel liquéfié Novatek a réduit de 30 % à 40 % le prix de ses cargaisons destinées au marché chinois depuis le mois d’août, selon plusieurs sources du secteur. Ces réductions ont permis de débloquer les premières ventes commerciales du projet Arctic LNG 2, confronté aux restrictions économiques imposées par les États-Unis et plusieurs pays européens.
Le projet Arctic LNG 2, d’un montant estimé à $21bn, était resté sans acheteur depuis son lancement opérationnel en décembre 2023. Novatek a vendu sa première cargaison le 28 août avec un rabais de $3 à $4 par million de British thermal units (mmBtu), par rapport au prix de référence asiatique avoisinant $11. Quatorze livraisons ont été effectuées depuis cette date, selon une autre source proche des transactions.
Des prix en forte baisse pour écouler les volumes
Les cargaisons seraient ainsi vendues entre $28mn et $32mn, soit en dessous de leur valeur marchande estimée à plus de $44mn. Ces conditions ont attiré des acheteurs chinois, bien que leurs noms n’aient pas été confirmés. Le gaz est livré au terminal de Beihai, situé dans le sud de la Chine, qui appartient à PipeChina, opérateur public d’infrastructures énergétiques.
L’administration américaine a imposé des sanctions spécifiques au projet Arctic LNG 2 peu après sa mise en service. Des partenaires internationaux, dont TotalEnergies, s’en sont retirés, alors que les groupes China National Petroleum Corporation (CNPC) et China National Offshore Oil Corporation (CNOOC) ont conservé leur participation de 10 % chacun.
Inertie américaine face aux achats chinois
Malgré les menaces publiques de Washington à l’encontre des pays continuant à acheter l’énergie russe, aucune mesure coercitive n’a été prise à l’encontre des entités chinoises ayant participé aux achats de gaz russe. Des sources à Pékin confirment que le gouvernement a approuvé ces importations. L’administration américaine n’a pas commenté l’absence de sanctions spécifiques visant ces acteurs.
Le terminal de Beihai, auparavant utilisé pour divers approvisionnements internationaux, y compris huit cargaisons américaines en 2024, est désormais réservé exclusivement aux importations de gaz russe, selon un négociant basé en Chine. En octobre, le Royaume-Uni a inscrit Beihai sur sa liste de sanctions.
Risques croisés entre commerce et géopolitique
L’exclusivité de Beihai pour le gaz russe limite les options logistiques pour d’autres fournisseurs, notamment américains. En parallèle, la Chine n’a plus importé de gaz naturel liquéfié des États-Unis depuis février, en raison des droits de douane rétablis dans le cadre des tensions commerciales entre Pékin et Washington.
L’éventualité de sanctions contre PipeChina, qui gère l’essentiel du réseau chinois d’importation, poserait un risque stratégique pour les États-Unis eux-mêmes, selon un dirigeant occidental actif sur le marché chinois. L’administration Trump a intégré l’exportation d’énergie américaine dans ses accords commerciaux, mais les implications de cette politique restent à clarifier face aux achats continus de gaz russe par la Chine.