Le Royaume-Uni a lancé son septième cycle d’enchères de contrats pour la différence (Contracts for Difference – CfD) pour l’éolien en mer, marquant une rupture stratégique après les résultats décevants des deux précédentes éditions. L’Allocation Round 7 (AR7) introduit un cadre repensé, étendu à 20 ans, avec un budget réduit de 41 %, mais conçu pour optimiser le rapport coût-efficacité par mégawatt. Cette approche vise à restaurer la confiance des développeurs, des investisseurs et des fournisseurs dans un contexte de volatilité du marché.
Un modèle réajusté pour maximiser la capacité attribuée
Le nouveau cadre introduit par le Department for Energy Security and Net Zero (DESNZ) cherche à obtenir davantage de mégawatts à un prix unitaire inférieur. Selon les projections, entre 4 et 6 projets pourraient être sélectionnés, représentant une capacité totale estimée à environ 5,5 GW. Ce niveau reste proche de celui de l’AR6, bien que le budget alloué ait été fortement revu à la baisse. Le mécanisme de « top-up » conditionnel permettra d’activer un complément budgétaire, sous réserve de validation du Trésor britannique, si les offres reçues présentent un bon rapport qualité-prix.
Les nouvelles conditions contractuelles donnent aux développeurs la possibilité de réduire leurs offres jusqu’à 12 %, grâce à l’allongement des CfD à 20 ans. Cette durée plus longue atténue les risques de revenus et améliore l’accès à des financements tiers, notamment via des cessions partielles ou des partenariats institutionnels.
Concurrence accrue entre projets des cycles de location LR3 et LR4
L’appel d’offres AR7 voit s’affronter 26,5 GW de capacités admissibles pour un nombre limité de places. Les décisions d’attribution ne seront plus fondées uniquement sur les coûts, mais également sur des impératifs stratégiques tels que le respect des échéanciers internes, la sécurisation des chaînes d’approvisionnement et la pression des frais liés aux options de location.
Les projets issus du Leasing Round 4 (LR4), tels que Morgan et Mona, sont incités à soumissionner agressivement pour éviter des pertes liées aux frais d’option, qui peuvent atteindre jusqu’à GBP185mn par GW par an. À l’inverse, certains projets du Leasing Round 3 (LR3), comme Norfolk Vanguard développé par RWE, sont déjà engagés contractuellement sur des équipements critiques et doivent sécuriser leurs CfD sous peine de révision de prix ou de perte de créneaux de production.
Une tension stratégique amplifiée pour les développeurs majeurs
RWE émerge comme un acteur central de cette compétition, avec des actifs dans les trois catégories stratégiques : LR4 à forte pression financière, LR3 sous contrainte contractuelle et projets dits « Extensions » à risque faible. Sa stratégie de portefeuille pourrait déterminer en grande partie les résultats de cette ronde.
Les projets d’extension, moins risqués mais à faible coût, doivent choisir entre soumettre une offre maintenant ou parier sur de meilleures conditions à l’AR8. Cette dynamique crée une pression asymétrique entre développeurs spécialisés sur un seul actif, comme Equinor, et ceux disposant d’un portefeuille diversifié.
Impact sur les chaînes d’approvisionnement et stabilité du marché
Le nouveau cadre stabilise également les perspectives des fournisseurs industriels. Le calendrier d’exécution des projets pour 2029-2032 coïncide avec une période d’assouplissement de la capacité de production, favorisant un alignement des offres et la sécurisation des commandes. Le dispositif Clean Industry Bonus (CIB) de GBP544mn encourage les investissements dans les usines et les ports britanniques, tout en incitant à la localisation de la production.
Cette stabilité est perçue comme un levier essentiel pour convertir les intentions d’investissement en commandes fermes, tout en évitant les cycles de surchauffe ou d’effondrement de la demande.
Des conditions réunies pour soutenir la compétitivité durable
L’équilibre entre discipline capitalistique, visibilité sur les recettes futures et mécanismes de soutien ciblés permet d’éviter un effondrement des prix similaire à celui de 2021. Si les offres atteignent le seuil attendu et que l’enveloppe est pleinement utilisée, AR7 pourrait marquer un tournant pour la filière éolienne offshore britannique.
Ce modèle pourrait inspirer d’autres gouvernements confrontés à des arbitrages budgétaires similaires, en démontrant qu’une planification stable, combinée à des incitations industrielles ciblées, peut générer des résultats concrets sans compromettre la viabilité économique des projets.