La Cour de justice de l’Union européenne a annulé l’autorisation délivrée par la Commission européenne en 2017 concernant l’aide publique accordée par la Hongrie pour la construction de deux nouveaux réacteurs nucléaires à Paks II. La décision fait suite à un recours de l’Autriche, qui contestait tant l’octroi direct du contrat de construction que le financement étatique sans appel d’offres.
Dans son arrêt, la Cour a jugé que la Commission n’a pas vérifié si l’attribution directe du contrat à l’entreprise russe Nizhny Novgorod Engineering respectait les règles européennes en matière de marchés publics. La Cour estime également que la motivation de la décision de la Commission est insuffisante sur ce point, notamment en ce qui concerne la conformité de la procédure de passation avec les normes communautaires.
Un financement bilatéral russo-hongrois sous examen
L’accord entre la Hongrie et la Russie, signé en 2014, prévoyait que la société publique hongroise MVM Paks II reçoive un financement intégral de l’État hongrois, complété par un prêt étatique russe couvrant jusqu’à 80 % des coûts du projet. Ce financement est estimé à EUR10.0bn ($10.5bn). Le contrat de construction avait été attribué sans mise en concurrence à une entité russe, dans le cadre de cet accord bilatéral.
La Commission européenne avait validé cette configuration en mars 2017, en se basant uniquement sur la conformité de l’aide d’État aux règles européennes. L’Autriche, qui ne dispose d’aucune centrale nucléaire sur son territoire, a déposé un recours contre cette décision, qui a d’abord été rejeté par le Tribunal de l’Union européenne en 2022, avant que la Cour de justice n’annule ce jugement.
Conséquences juridiques incertaines pour le calendrier du projet
La Hongrie a réagi en affirmant que l’arrêt ne remet pas en cause la poursuite du chantier. Le ministre des Affaires étrangères, Péter Szijjártó, a déclaré que le gouvernement considère toujours Paks II comme un pilier de la sécurité énergétique nationale, et que la décision « ne limite ni ne ralentit » les travaux. Selon lui, la connexion des deux nouveaux réacteurs au réseau électrique reste prévue pour le début de la prochaine décennie.
Le site de Paks, situé à 100 kilomètres au sud de Budapest, abrite actuellement quatre réacteurs russes de type VVER-440 mis en service entre 1982 et 1987. Le projet Paks II vise à ajouter deux unités VVER-1200 de génération plus récente. Le permis de construire a été délivré en 2022, et les premiers travaux de bétonnage sont attendus d’ici la fin de l’année.
Antécédents juridiques similaires dans l’Union européenne
Ce n’est pas la première fois que l’Autriche engage une action contre un projet nucléaire soutenu par des fonds publics dans un autre État membre. En 2015, elle avait déjà contesté le soutien britannique au projet Hinkley Point C au Royaume-Uni, mais le Tribunal de l’UE avait alors rejeté sa demande en 2018. Dans le cas de Paks II, la Cour de justice a pris une position différente en insistant sur l’obligation de la Commission d’examiner également les procédures de passation de marchés publics.