Singapour et la Thaïlande ont conclu un accord bilatéral d’implémentation dans le cadre de l’Article 6 de l’Accord de Paris. Il s’agit du premier partenariat de ce type entre Singapour et un pays de l’ASEAN (Association of Southeast Asian Nations), et du huitième accord signé par Singapour au niveau international. Cet accord permet l’échange transfrontalier de crédits carbone, également appelés Internationally Transferable Mitigation Outcomes (ITMOs), assortis d’ajustements correspondants afin d’éviter tout double comptage.
Un cadre bilatéral juridiquement contraignant
L’accord définit un cadre légal commun pour autoriser les projets de crédits carbone et garantir leur conformité aux règles internationales. Les entreprises singapouriennes, soumises à la taxe carbone nationale, pourront acquérir ces crédits pour couvrir jusqu’à 5 % de leurs émissions taxables. Du côté thaïlandais, l’accord prévoit la mise en place de procédures pour valider et transférer les réductions d’émissions générées par des projets locaux.
Ce dispositif renforce la position de Singapour comme place centrale du marché carbone en Asie du Sud-Est. Pour la Thaïlande, il offre une opportunité d’attirer des financements liés à des projets dans des secteurs tels que la reforestation, la production d’énergie renouvelable et le transport électrique.
Un précédent régional dans l’ASEAN
Cette coopération marque une étape pour l’ASEAN, qui cherche à établir un cadre commun pour le commerce des crédits carbone. Elle intervient alors que plusieurs pays de la région, dont le Vietnam et l’Indonésie, développent également leurs propres infrastructures réglementaires pour intégrer les mécanismes de l’Article 6.
La Thaïlande n’en est pas à sa première transaction : elle avait déjà participé à la première vente d’ITMOs en 2023, lorsque la fondation suisse KliK avait acquis 1,906 million de crédits auprès de l’entreprise Energy Absolute Public Company Limited pour le programme d’autobus électriques de Bangkok. Ce nouvel accord avec Singapour consolide la trajectoire du pays vers un rôle de hub régional dans les échanges de crédits carbone.
Un marché en structuration après la COP29
L’accord prend effet dans un contexte de montée en puissance des activités Article 6 depuis l’adoption des règles définitives lors de la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique (COP29) à Bakou. Les prix des crédits conformes à l’Article 6 se distinguent nettement du marché volontaire classique, avec des enchères déjà observées entre 25 et 55 dollars de Singapour par tonne, soit environ 18,70 à 41,20 dollars américains.
Cette évolution attire l’attention des investisseurs institutionnels et des gouvernements de la région, qui voient dans ces mécanismes une opportunité d’allocation de capitaux dans des projets énergétiques et d’infrastructures. Reste à savoir si d’autres pays de l’ASEAN suivront rapidement la même voie et élargiront le marché régional des crédits carbone.