Le tribunal régional de Brno a invalidé la requête déposée par Électricité de France (EDF) contre l’appel d’offres ayant désigné Korea Hydro & Nuclear Power (KHNP) pour édifier deux réacteurs sur le site de Dukovany. La décision maintient sans réserve le contrat de €16bn ($17.1bn), formalisé au début de juin, pour lequel EDF réclamait des réparations financières après son éviction en deux mille vingt-quatre. La cour a jugé la procédure conforme au droit tchèque de la commande publique, écartant les arguments relatifs à une prétendue inégalité de traitement. EDF dispose de huit jours pour former un recours devant la Haute Cour administrative.
Valeur stratégique du chantier
Le gouvernement considère ces unités nucléaires comme un pivot de la sortie du charbon et du renforcement de la sécurité d’approvisionnement, le pays important désormais peu de pétrole et de gaz russes. Chaque réacteur doit coûter environ CZK200bn ($8.7bn), prix jugé « hautement compétitif » par le ministère de l’Industrie. Selon le calendrier officiel, le chantier débutera en deux mille vingt-neuf pour une mise en service du premier bloc en deux mille trente-six, prolongeant la durée de vie du parc existant. Les autorités tablent sur un gain de capacité de un gigawatt par réacteur, soit près de douze % de la demande annuelle actuelle.
Le ministre de l’Industrie, Lukas Vlcek, a salué le jugement sur le réseau social X et affirmé que le résultat « confirme la transparence de l’appel d’offres ». De son côté, EDF a indiqué dans une note transmise aux médias qu’elle « étudiera toutes les options juridiques » pour protéger ses intérêts. Le groupe a déjà porté le dossier devant la Commission européenne (CE), qui vérifie si KHNP a bénéficié de subventions publiques susceptibles de fausser la concurrence à l’échelle de l’Union européenne (UE). Bruxelles n’a pas encore livré de calendrier pour sa conclusion.
Risques financiers et calendrier des recours
Un éventuel engagement de la CE pourrait aboutir à des mesures compensatoires allant d’une amende à l’annulation partielle de l’aide présumée. Les analystes de Wood & Company estiment qu’un retard supérieur à douze mois alourdirait la facture de construction d’environ cinq % par an. Pour EDF, une réparation financière dépendrait de la démonstration d’un préjudice direct, point déjà réfuté par le tribunal tchèque. KHNP a déclaré qu’elle « respectera toute enquête européenne » tout en poursuivant la préparation technique du site.
La sécurité d’approvisionnement reste la priorité pour Prague, dont la consommation électrique augmente en moyenne de 1.8 % chaque année, soutenue par la reprise industrielle. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la part du nucléaire pourrait atteindre quarante % du mix tchèque à l’horizon deux mille quarante, contre trente-trois % actuellement. Les autorités espèrent ainsi limiter les importations et stabiliser les prix domestiques de gros, fortement corrélés au gaz depuis la crise énergétique européenne. La décision de Brno assure pour l’heure la continuité du projet, tandis que le marché surveille l’issue des démarches engagées à Bruxelles.